par Xavier Grosclaude, le mercredi 18 novembre 2009

Quel que soit le pays, les débats sur l'identité nationale sont toujours intéressants d'un point de vue académique même s'ils sont rarement constructifs sur le plan politique. Un seul exemple déjà oublié ! En 1993, le code de la nationalité française a fait l'objet de modifications jugées nécessaires à la défense de l'identité nationale, modifications qui seront annulées quelques années plus tard dans une indifférence générale. Est-ce à dire que les modifications apportées étaient sans objet ?


Chacun est libre d'apporter « sa » réponse à cette question mais une réalité ne doit pas nous échapper, ces « vrais-faux » débats sur l'identité nationale renvoient souvent à des approches plus exclusives qu'inclusives… Or, même si nous sommes au XXIème siècle, nous aurions tort d'oublier les efforts accomplis, depuis 1957, pour donner un sens commun aux mots « inclusion », « intégration » et « cohésion ».

Lors d'un diner à Londres, je me rappelle d'un échange particulièrement captivant avec un ami français d'origine berbère. Il souhaitait pour diverses raisons, toutes pertinentes, que l'identité berbère soit mieux reconnue en France. Sur le fond, je comprenais ses motivations, néanmoins je n'ai pas pu m'empêcher de lui demander comment il pensait être perçu en Asie ? Berbère, Français, ou Européens ? Européen, of course… Preuve s'il en est qu'une identité n'est pas qu'un problème de définition mais aussi de perception par les autres.

Cette vérité, valable pour les pays comme pour les personnes physiques, n'a aucun rapport avec la langue. Il suffit pour s'en convaincre de négocier avec des Québécois pour comprendre qu'ils sont avant tout « nord-américains » avant d'être européen ! Certes, le fait de parler la même langue facilite de toute évidence les échanges mais cela n'influence en rien leur façon d'être.

En terme d'identité, le défi pour l'Union Européenne, à la lumière de l'amitié franco-allemande, a toujours été de passer de la logique statique du « nous contre eux », terreau de tous les errements nationalistes, à la logique dynamique du « nous avec eux ». Cette logique, soyons lucides, n'est pas toujours aisée à mettre en œuvre mais elle est la seule qui laisse ouvert le champ des possibles. Dit autrement et de façon plus prosaïque, il est aujourd'hui impossible de savoir quel sera dans dix ans l'état des relations entre la l'Union Européenne et la Turquie mais il est possible d'ici là de tout faire pour cultiver, dans un respect mutuel, les convergences au profit des deux parties voire de tiers.

Aujourd'hui, après plus d'un demi-siècle d'existence, j'ai tendance à penser que la construction européenne a plutôt préservé les identités nationales tout en leur permettant d'évoluer positivement dans le sens d'une ouverture aux autres.

Enfin, même si son existence est parfois contestée, l'identité européenne présente à mes yeux un « avantage compétitif » non négligeable par rapport aux identités nationales, elle n'a pas besoin d'être matérialisée pour exister. Sa modernité réside quelque part dans son immatérialité. Aucun drapeau européen ne flotte sur l'Afghanistan, aucun hymne européen n'est joué sur le sol afghan pourtant plus de la moitié des soldats présents en Afghanistan sont européens. Des soldats qui se battent au nom « des héritages culturels, religieux et humanistes de l'Europe, à partir desquels se sont développées les valeurs universelles que constituent les droits inviolables et inaliénables de la personne humaine, ainsi que la liberté, la démocratie, l'égalité et l'État de droit ». A vous de trouver la référence…



xavier.grosclaude-Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.


Xavier Grosclaude est diplômé en sciences politiques et en droit communautaire. Membre de plusieurs think tanks français, il combine une double expérience des affaires européennes en France et au Royaume-Uni.  

Organisations en lien avec Fenêtre sur l'Europe :