par Emmanuel Dupuy, le vendredi 02 mai 2008

Le monde semble découvrir le rôle central de l'agriculture à mesure que s'amplifient les dramatiques "émeutes de la faim" un peu partout dans le monde. L'insécurité alimentaire, pouvant potentiellement "alimenter" des troubles politiques et des désordres sociaux, préalables à d'éventuelles guerres civiles ou rivalités armées entre Etats, comme cela a été mis en exergue dans plusieurs rapports émanant de la Banque mondiale, du FMI, de la FAO et du Centre International de Hautes Agronomiques Méditerranéennes CIHEAM, notamment dans son dernier rapport Mediterra 2008 portant sur les futurs agricoles et alimentaires en Méditerranée. La communauté internationale cherche les bonnes parades...


La conjonction du doublement du prix des denrées alimentaires avec celui du prix du pétrole, d'une crise financière dont les turbulences ne font que débuter et des effets du changement climatique, de l'effet pervers de l'accroissement de la production des biocarburants, rendent la situation dramatiquement explosive.

La mondialisation aurait-elle accouché d'un monstre ? Comment n'avons-nous rien vu venir ? Que peuvent faire les Etats, qui hormis appeler de leur vœux la tenue en toute urgence d'une conférence mondiale sur la sécurité alimentaire des pays fragiles, n'ont guère les moyens de faire face, seuls, à l'ampleur de la crise. Que sont, en effet, les 500 millions dollars de déficit qu'accuse le Programme alimentaire des Nations Unis, au regard des 300 milliards de dollars des fonds souverains, appelés à la rescousse ?

On le voit, la crise va durer et sans doute s'amplifier, des gouvernements seront sans doute déstabilisés, des populations encore plus lésées, des choix politiques, liés aux ajustements structurels, pointés du doigt.

Cet important débat en révèle un autre, celui sur la grave crise de la gouvernance mondiale qui, au moment où seulement 1 personne sur 6 est issue de "l'Occident", ne correspond plus à la réalité géopolitique. La réforme attendue du Conseil de sécurité des Nations, comme du fonctionnement des institutions issues du système de Bretton Woods n'en sont que quelques révélateurs. La pérennisation d'un G-13, plus en conformité que le G-8, avec les dynamiques économiques actuelles en complète le panorama.

La globalisation stratégique s'impose donc à nous avec cette actualité dramatique. Elle semble nous rappeler aussi que "la faim est aussi faite de la main d'homme", comme le prophétise depuis de nombreuses années, le rapporteur spécial de l'ONU pour le droit à l'alimentation, Jean Ziegler…




Emmanuel Dupuy est président Institut Prospective et Sécurité en Europe (IPSE)
http://www.ipse-eu.org


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