2012 est née avec une Europe en panne, de par l'attentisme et la volonté tactique de ses deux « premiers » leaders, le « fameux » couple Merkozy, qui déploient des trésors d'imagination pour intégrer (un peu) l'Europe tout en tentant de persuader leurs électeurs que l'Etat-nation reste le maître absolu du jeu, drapé dans sa souveraineté éternelle !
Sauf que le monde mute à toute vitesse, et nos créanciers deviennent toujours plus exigeants et frileux face à nos vieux pays ruinés et à bout de souffle, sans passion ni idées. L'Europe et l'Etat-nation : le grand écart permanent va finir par leur créer une grave déchirure.
J'espère que 2012, du moins les 6 premiers mois, jusqu'à cette présidentielle française qui ne résoudra rien à sa petite échelle, ne sera pas une année " horribilis", où le nationalisme-populisme l'emportera sur la nécessaire convergence budgétaire, financière, fiscale, sociale de l'Europe. Où les principaux protagonistes risquent non seulement de s'invectiver dans un manichéisme indécent, mais de sombrer dans un racolage électoral de plus en plus populiste et indigne. On a déjà tous les prémices avec les sortants : chasse aux Roms (bien qu'Européens !), aux étudiants étrangers, aux travailleurs étrangers (circulaire sur les « métiers en tension »). Gare aussi aux promesses démagogiques des autres qui pourraient nier la crise, et les futures années d'austérité.
Attention, 330 millions d'Européens ayant l'euro attendent cette Europe là, de la relance, pas celle de Merkozy, et peut-être même 500 millions d'Européens de l'UE (sauf les Anglais, peut-être ?)
C'est la trêve des confiseurs, donc on ne parle pas, ces jours-ci, du triple A ou des marchés. Mais rien n'est réglé, dans cette Europe intergouvernementale, où chacun voit ses propres intérêts, sans vision cohérente ni solidaire
Cela est triste, et irresponsable. Je l'ai dénoncé maintes fois dans ce blog, les dirigeants actuels sont plus obnubilés par leur carrière politique que par l'avenir des personnes qu'ils sont censés représenter, et si possible défendre.
2012 commencera donc, j'en suis désolé et un peu inquiet, comme 2011 a fini : avec des dettes colossales qu'un « Etat-nation » à lui seul ne saurait résorber, encore moins rembourser. Mais aussi, bien au-delà de la question des dettes, 2012 verra davantage encore une crise économique, sociale, morale (corruption ! Affaires d'Etat non élucidées !), culturelle et psychologique.
Tout cela fait que nous ne donnons guère confiance aux autres, au reste du monde qui va bien, lui, qui prospère et travaille, et qui aura progressivement moins besoin de nous que nous n'aurons besoin de lui, de ses financements comme de sa main d'uvre.
La France devra trouver 160 milliards d'euros sur les marchés en 2012, les autres pays malades aussi : la Grèce (dès février), l'Irlande, le Portugal.
Les bricolages (FESF) que je dénonçais dans un blog précédent ne suffiront évidemment pas. Et comme nous serons en récession ou en « croissance » ridicule (0,2 à 0,4%), ne comptons pas sur des recettes. Il faudra donc bien de sérieux plans de rigueur, des impôts augmentés et des ponctions de toute sorte pour que l'Etat puisse finir ses fins de mois, voire de semaine
Le moment de ces purges dépendra de la
sincérité ou du courage politique des sortants : avant ou après le 6 mai ?
Et cette purge sera d'autant plus sévère que nous trouverons, ou pas, des créanciers très convoités ! Les Chinois n'ont toujours pas dit oui, car leur opinion publique (et oui, même eux !) est hostile à aider l'Europe alors qu'ils ont encore des pauvres chez eux. Les autres grands trainent des pieds aussi (Indiens, Brésiliens). Ou alors, à quel prix
Déjà la France, dégradée « de fait », emprunte à 3,5%, les Allemands à 2%
L'Italie à 7%
L'euro-stock a perdu 20% de sa valeur en 2011, le CAC 40 aussi
Les purges et la rigueur, indispensables, ne suffiront donc pas. Il faudra aussi penser à la relance, donc retrouver la compétitivité pour faire repartir la machine et l'emploi. Avec l'argent des Européens eux-mêmes, s'il le faut. Mais de tout cela, les candidats n'en parlent pas. Trop tôt, trop compliqué. Dormez tranquille !
Les Etats-Unis, eux, finissent (un peu) mieux l'année 2011, et ont de bien meilleures perspectives de croissance, eux ! On croit rêver, eux qui sont à l'origine de la crise !!
Chacun d'entre nous, à la place de nos dirigeants inconséquents, doit donc se poser les bonnes questions. Pourquoi ? Parce que les Etats-Unis ont un Etat fédéral, puissant, uni et solidaire, où la Banque centrale rachète la dette. Mais ils n'ont pas 51 « présidents de la République » qui, divisés, seraient inutiles, comme nos 27. La solution est donc (relativement) simple. Une Europe fédérale mutualiserait dette et politique de relance avec un Trésor commun. Mais Merkozy veulent d'abord leur réélection avant d'agir, vraiment unis et solidaires.
Le sablier est déclenché
L'avenir dira si nos pays pourront tenir plusieurs mois ainsi
Mais à quelques heures des premières agapes, je ne voudrais pas terminer sur des réflexions aussi graves. Mais par une (petite) note d'espoir. Elle nous vient de la
Banque Centrale européenne. Sans avoir (encore) l'autorisation d'intervenir directement et massivement en dernier ressort (comme aux Etats-Unis), elle ouvre aux banques une énorme ligne de crédit à taux préférentiel (1%) : 500 milliards d'euros. Cela s'ajoute aux prêts sur trois ans qu'elle leur accorde déjà. Bien sûr, cela ne suffirait pas à sauver l'Espagne, l'Italie, la France. Mais c'est quand même une réelle bouffée d'oxygène, un beau cadeau de Noël, lorsque l'on sait qu'en Europe les financements (Entreprises, particuliers) passent par les banques, alors qu'aux Etats-Unis, ils passent par les marchés. En irriguant les banques de la sorte, Mario Draghi, le nouveau Président de la BCE, redonne de la liquidité aux banques qui alimentent toute l'économie. C'est déjà cela, merci Mario ! La BCE fait donc le boulot
sans le dire ! J'ai même cru comprendre qu'elle prévoyait une nouvelle opération en février ! Mais chut, ne le répétez pas !
J'avais peu de bonnes nouvelles à vous donner depuis plusieurs mois, celle-ci est arrivée in extremis !
Joyeux Noël, passez de bonnes fêtes de fin d'année, et recevez, pour chacune et chacun d'entre vous, mes vux les plus chaleureux de bonne et heureuse année 2012 !
Euroblod d'Alain Malégarie
http://euroblog-alainmalegarie.eu
Alain Malégarie été le Directeur Général durant de nombreuses années, de 1995 à 2005, de l'Institut de l'Euro. A vocation pédagogique, ce centre de documentation était destiné à préparer les entreprises, les collectivités locales et les particuliers à l'euro.
Enfin, Alain Malégarie fait partie de ces infatigables militants de la cause européenne. Vice-Président de l'association Europe Info, dépositaire du label « Europe Direct » en tant que centre officiel de documentation de la Commission européenne, il anime également 2 chroniques européennes sur 2 radios locales lyonnaises.