C'est parti ! Le Président François Hollande va entamer dès ce mardi un marathon diplomatique comme peu de présidents en ont eu au début de leur mandat. Le président élu n'aura même pas eu le temps de prendre quelques jours de congés. Dès le lendemain de son élection, il a été happé par de questions toutes aussi urgentes les unes que les autres. Mardi, au moment de s'envoler pour Berlin, il aura nommé son Premier ministre. Le nom de ce personnage clé de la V° République puisqu'il est, aux termes de la Constitution, le chef de la majorité parlementaire, sera très important, : il constituera un acte politique majeur à l'adresse tant des Français et des électeurs à quelques semaines des élections législatives, mais aussi à destination des partenaires de la France sur la scène internationale.
Un ballet diplomatique intense à l'antenne présidentielle
Ce qui est en cause bien sûr, ce sont à la fois les engagements du candidat Hollande, mais aussi la crédibilité de la France sur la scène internationale au regard des contraintes extrêmes qui pèsent sur elle : crise économique et financière, engagements militaires à l'étranger, en Afghanistan notamment.
Quoi qu'il en soit, l'ère Sarkozy a été fermée avec une célérité impressionnante. De nombreuses et éminentes personnalités ont ainsi défilé avenue de Ségur, à l'antenne présidentielle, cette semaine, avant même la prise de fonction de François Hollande. Ont ainsi défilé, entre autres, à l'ancien QG de campagne du candidat Hollande, les ambassadeurs des Etats-Unis dAmérique et de Chine. Les représentants de ces deux pays avaient à cur d'informer dans les plus brefs délais leurs pays respectifs des intentions de François Hollande, et ce avant le sommet de l'OTAN qui doit se tenir en fin de semaine aux Etats-Unis. François Hollande est inconnu sur la scène internationale et les premières rencontres qu'il va avoir cette semaine seront cruciales pour jauger la capacité du nouveau président à maintenir ses engagements, notamment s'agissant du retrait anticipé des troupes françaises en Afghanistan, à résister à la pression personnelle du président des Etats-Unis.
Ont aussi rendu visite à François Hollande M. Van Rompuy, président du conseil européen des chefs d'Etat et de gouvernement ainsi que M. Jean-Claude Junker, Premier ministre luxembourgeois et surtout président de l'Eurogroupe dont le rôle aujourd'hui est essentiel dans le cadre de la crise de la dette que connaît l'Union européenne avec son talon d'Achille que constitue la Grèce, dont la situation est des plus instables à l'heure qu'il est
On connaît la capacité d'adaptation de M. Van Rompuy aux subtilités de la scène européenne et il a certainement voulu jauger la personnalité du nouveau président de la République française. Quant à Jean-Claude Junker, vieux routier de la scène européenne, le président a dû être embarrassé par les embrassades quelque peu exagérées de celui qui s'est fait fort de le convaincre de renoncer à sa volonté, clairement affichée durant la campagne, de renégocier le traité sur la discipline budgétaire en Europe
Un bras de fer avec Angela Merkel ?
Quant à Angela Merkel, que François Hollande ira rencontrer dès mardi après-midi, celle-ci a dit haut et fort devant le Bundestag, qu'elle ne céderait pas d'un pouce et qu'il était hors de question de renégocier le traité de discipline budgétaire négocié notamment avec Nicolas Sarkozy. François Hollande a prévenu : la rencontre de mardi ne sera pas décisionnelle et sera destinée simplement à faire connaissance
.Le porte-parole du PS Benoît Hamon a quant à lui déclaré que Mme Merkel ne pouvait faire l'Europe à elle seule
Les armes sont d'ores et déjà fourbies.
Mais rassurons-nous, cette rencontre se terminera cordialement par une conférence de presse commune au cours de laquelle les deux dirigeants déclareront vouloir travailler en commun, notamment sur la croissance, sujet primordial en Europe. Mais dès mardi, un premier indice de la crédibilité de François Hollande sera donné : oui ou non menacera-t-il de ne pas ratifier en France les traités négociés avec Angela Merkel si un volet croissance n'est pas raccroché à ces traités ? Le compromis franco-allemand fonctionnera-t-il à plein régime dès ce mardi par l'information selon laquelle en contrepartie d'un renoncement du président Hollande à modifier les traités si rapidement élaborés dans une période de crise, le conseil européen du mois de juin sera entièrement consacré à la croissance, ce que démontrerait la réunion informelle initiée par Herman Van Rompuy le 23 mai prochain ?
Comme on le voit, les premiers pas de François Hollande sur la scène internationale seront décisifs. Ils seront examinés à la loupe partout les observateurs politiques et journalistes surtout que des résultats tangibles doivent être au moins attendus dans les semaines qui viennent dans la perspective des élections législatives des 10 et 17 juin.
Dès cette semaine, avec ses plus proches conseillers qui ne l'ont pas quitté, MM. Moscovici et Valls, il a préparé cette semaine décisive. Il vient aussi de nommer son conseiller diplomatique qui va l'accompagner dans ses pérégrinations internationales. Il se donne ainsi tous les outils pour réussir la première étape de son action internationale. Rendez-vous à la fin de la semaine !
Patrick Martin-Genier est Maître de conférence à l'Institut d'études politiques de Paris, vice-président et éditorialiste de fenêtre sur l'Europe