par Publius, le jeudi 13 décembre 2012

Alors que le Conseil Européen a à nouveau repoussé toute perspective d'approfondissement de l'"Union politique" en soutien de l'union économique et monétaire, le texte suivant - signé "Publius" - propose que le Parlement européen prenne l'initiative d'une révision des Traités via la convocation d'une Convention ".


Avant-projet de Résolution du Parlement européen relatif à la révision des Traités

LE PARLEMENT EUROPÉEN

A . CONSIDÉRANT LA NÉCESSITÉ DE POURSUIVRE LE RENFORCEMENT DE L'UNION EUROPÉENNE, SOCLE DE L'UNITÉ ET DE LA SOLIDARITÉ DES PEUPLES EUROPÉENS ET ÉLÉMENT INDISPENSABLE DE L'ÉQUILIBRE D'UN MONDE GLOBALISÉ

B . CONSIDÉRANT QUE LE TRAITÉ DE LISBONNE N'A PAS SUFFISAMMENT CONSOLIDÉ LES BASES CONSTITUTIONNELLES ET INSTITUTIONNELLES D'UNE UNION TOUJOURS EN CONSTRUCTION ET DONT L'ÉLARGISSEMENT N'EST PAS PARVENU À SON TERME

C . CONSIDÉRANT EN PARTICULIER L'INACHÈVEMENT ET LA FRAGILITÉ DES BASES CONSTITUTIONNELLES DE L'UNION ÉCONOMIQUE ET MONÉTAIRE (INCHANGÉES DEPUIS MAASTRICHT EN 1993) DONT LA CRISE FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE ACTUELLE DÉMONTRE LA FRAGILITÉ ET L'INSUFFISANCE

D . CONSIDÉRANT QUE CES CARENCES MINENT LA CONFIANCE DE L'OPINION PUBLIQUE DANS LA CAPACITÉ DE L'UNION EUROPÉENNE À ASSURER LE DESTIN DÉSORMAIS PARTAGÉ DE SES PEUPLES

E - CONSIDÉRANT LE BESOIN, DIX ANS APRÈS L'OEUVRE INACHEVÉE DE LA CONSTITUTION EUROPÉENNE, D'OUVRIR UN NOUVEAU DÉBAT PUBLIC SUR LA POURSUITE DE L'INTÉGRATION POLITIQUE, ÉCONOMIQUE ET SOCIALE AU SEIN DE L'EUROPE

F . CONSIDÉRANT QUE LA PROCHAINE ÉCHÉANCE DE 2014 - LORS DE LAQUELLE LES PEUPLES DE L'EUROPE SERONT APPELÉS À DÉSIGNER LEURS NOUVEAUXREPRÉSENTANTS AU SEIN DU PE ET, PAR LÀ MÊME, AU SEIN DE LA COMMISSION - DOIT ÊTRE L'OCCASION DE LA NÉCESSAIRE RELANCE DE CETTE INTÉGRATION

E - CONSIDÉRANT QUE - SELON LA NOUVELLE PROCÉDURE PRÉVUE PAR LE TRAITÉ DE LISBONNE - CE PROCESSUS CONSTITUTIONNEL PEUT ÊTRE OUVERT À LA DEMANDE DU PARLEMENT EUROPÉEN, DE LA COMMISSION ET/OU D'UN OU PLUSIEURS ÉTATS MEMBRES, MOYENNANT L'ACCORD D'UN MAJORITÉ SIMPLE DE CES ÉTATS (SOIT 14 SUR 27).

1 . DEMANDE - EN APPLICATION DE L'ARTICLE 48 § 2 DU TRAITÉ DE LISBONNE (1) - LA CONVOCATION D'UNE CONVENTION CHARGÉE D'ÉLABORER UN PROJET DE RÉVISION CONSTITUTIONNELLE

2 . INVITE LA COMMISSION ET LES ETATS MEMBRES QUI LE SOUHAITENT À SE JOINDRE À CETTE DÉMARCHE

3 . ESTIME QUE CETTE CONVENTION DEVRA SE RÉUNIR DANS LES MEILLEURS DÉLAIS APRÈS LA RECOMPOSITION DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DE LA COMMISSION, EN TENANT COMPTE DU DÉBAT PRÉ-ÉLECTORAL ET DE L'EXPRESSION DE LA VOLONTÉ POPULAIRE TELLE QU'EXPRIMÉE PAR LE SCRUTIN DE MAI 2014

4 . PROPOSE QUE LES TRAVAUX DE LA CONVENTION SE CONCENTRENT NOTAMMENT SUR LES THÈMES SUIVANTS :

- UN MEILLEUR ÉQUILIBRE DÉMOCRATIQUE DU PROCESSUS DE DÉCISION ET DU RÔLE DES DIFFÉRENTES INSTITUTIONS

- UN RENFORCEMENT DES COMPÉTENCES DE L'UNION EUROPÉENNE DANS LES DOMAINES PRIORITAIRES TELS QUE L'UNION ÉCONOMIQUE ET MONÉTAIRE, LA POLITIQUE SOCIALE, LA POLITIQUE DE L'ÉNERGIE, LA POLITIQUE DE L'ENVIRONNEMENT, LA POLITIQUE ÉTRANGÈRE ET DE DÉFENSE - ET LA CAPACITÉ BUDGÉTAIRE DE L'UNION

- UNE PLUS GRANDE POSSIBILITÉ DE DIFFÉRENCIATION ENTRE LES ÉTATS MEMBRES POUR LA CONDUITE DES POLITIQUES COMMUNES DE L'UNION

5 . INVITE DÈS À PRÉSENT LA COMMISSION ET LE CONSEIL À SE JOINDRE AU PARLEMENT POUR INSTRUIRE ENSEMBLE LE DÉBAT SUR LE FUTUR DE L'UNION QUI DOIT PRÉCÉDER LA CAMPAGNE PRÉ-ÉLECTORALE DE MAI 2014 .

(1) ARTICLE 48 § 2 DU TRAITÉ SUR L' UNION EUROPÉENNE :

"2. LE GOUVERNEMENT DE TOUT ÉTAT MEMBRE, LE PARLEMENT EUROPÉEN OU LA COMMISSION PEUT SOUMETTRE AU CONSEIL DES PROJETS TENDANT À LA RÉVISION DES TRAITÉS."

EXPOSÉ DES MOTIFS

La crise internationale - financière puis économique - a démontré la fragilité et l'insuffisance des outils institutionnels dont dispose l'UE, de par les traités actuels, pour prévenir ou faire face à de telles crises et protéger les citoyens de leurs effets. En conséquence, elle met en péril tout l'édifice de l'UEM et, par là même, l'unité et la solidarité des États et des peuples de l'UE. Les mesures prises dans l'urgence par voie intergouvernementale - la méthode communautaire étant paralysée - ont souffert de l'absence de légitimité démocratique et constitutionnelle. Leur empilement - au fur et à mesure des évènements - ne peut suffire à consolider durablement l'UEM ni à rétablir la confiance des opérateurs économiques et de l'opinion publique. Ces carences constitutionnelles étaient reconnues depuis la signature du Traité de Maastricht mais, en vingt années, aucun renforcement n'a été sérieusement tenté - pas même lors des négociations sur le projet de Constitution européenne puis sur le Traité de Lisbonne. À présent, cette question ne peut plus être éludée.

Parallèlement, de graves lacunes ou insuffisances constitutionnelles - consenties par le Traité de Lisbonne - ont affecté le développement de plusieurs politiques communes essentielles telles que la politique sociale, la politique de l'énergie, la politique de l'environnement, la politique étrangère et de défense; de même, la capacité budgétaire de l'UE est restée entravée par les dispositions restrictives des traités. Les principales sources de blocage résident à la fois dans la limitation des compétences attribuées à l'Union dans ces domaines - et dans la défaillance des mécanismes institutionnels : incapacité décisionnelle du Conseil (par le maintien de la règle de l'unanimité sur les décisions de base), insuffisance de légitimité démocratique (par la limitation du pouvoir de co-décision du PE), faiblesse du pouvoir exécutif (par les restrictions affectant la capacité gouvernementale de la Commission). Il est temps d'y remédier.

3. L'hétérogénéité des stades de développement des États membres au sein de l'UE demande une plus grande souplesse dans la mise en oeuvre des politiques communes. Les dispositions prévues par les traités (cf. coopération renforcée) s'avèrent à cet égard inopérantes ou insuffisantes - ce qui risque de creuser un peu plus l'écart entre les différentes catégories d'États membres ou d'inciter certains d'entre eux à coopérer en dehors du cadre de l'UE. Les procédures existantes doivent donc être assouplies ou de nouveaux mécanismes mis en place pour permettre des rythmes différenciés de progression qui n'affectent pas les principes d'unité et de solidarité des États ni celui de l'unicité du cadre communautaire. La poursuite de l'élargissement de l'UE rend cette réforme particulièrement urgente.

4. Le Traité de Lisbonne (article 48 § 2) a sensiblement modifié la procédure de révision des traités. Celle-ci peut à présent s'ouvrir à la demande du Parlement européen, de la Commission ou d'un État membre. Il suffit d'une majorité simple d'États membres (soit 14 sur 27) pour que soit convoquée une Convention chargée d'élaborer un projet de révision en bonne et due forme ; ainsi que l'a montré par anticipation la Convention européenne de 2002, ce projet peut prendre la forme d'un traité constitutionnel. L'article 48 préserve certes le droit de veto de chacun des 27 États membres tant sur l'adoption finale du projet que sur sa ratification ; l'opportunité de maintenir cette règle hétérodoxe d'unanimité sera probablement examinée par la future Convention. En tout état de cause, son existence ne saurait justifier le renoncement a priori à toute entreprise de révision substantielle des traités et, par conséquent, à tout renforcement constitutionnel de l'Union ; si une très large majorité d'États membres se rallient in fine à cette réforme, sa légitimité politique finira par emporter la décision.

5. Faute d'avoir été initiée plus tôt, cette réforme ne pourra désormais pas avoir lieu avant l'échéance de 2014 qui verra notamment le recomposition du Parlement européen et de la Commission, lesquels désigneront leurs représentants, nouvellement légitimés, au sein de la Convention. Il importe toutefois que cette réforme soit précédée d'un débat public sanctionné par un vote démocratique : la campagne politique et le scrutin de 2014 en seront l'occasion. Ainsi, cette perspective de réforme donnera une dimension européenne au débat et suscitera une participation accrue des électeurs. La demande officielle d'ouverture de la procédure de révision doit donc se situer bien en amont de l'ouverture de la campagne électorale de 2014. Si ce rendez-vous était manqué, les perspectives de l'UEM et de l'Union tout entière seraient encore assombries.

6. Il est conforme à l'histoire constitutionnelle européenne qu'une telle initiative soit prise par l'Assemblée puis le Parlement européen. Il serait toutefois politiquement opportun que la Commission - comme son Président l'a annoncé devant le Parlement - se joigne à lui dans cette entreprise dès son origine. Plusieurs États membres - anciens et nouveaux - pourraient également s'y rallier; ceci aurait pour effet d'amplifier le débat préalable, de faciliter le vote majoritaire du Conseil pour la convocation de la Convention et de permettre à celle-ci d'ouvrir ses travaux sur des bases plus larges.


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