par Marianne Ranke-Cormier, le vendredi 11 février 2011

Malheureusement le pouvoir ne l'a pas compris, et laisse donc la situation se dégrader. Une promesses d'organiser des élections en septembre, donc aux calendes grecques, ne pouvait évidemment pas contenter les manifestants qui réclamaient le départ immédiat du président Moubarak. Une telle proposition démontre que le gouvernement égyptien n'a rien compris des enjeux pressants et de la détermination de la foule. Démocratie et Justice comment peut-on y être opposé? Que l'on soit pro ou anti Moubarak c'est une question qui se règle dans les urnes, à cela on ne peut rien contester.


Mais qui a conseillé Moubarak? Entouré depuis une semaine de la garde avancée pro-américaniste et d'obédience CIA - qui pensait-il donc duper alors qu'il nommait en tant que vice-président et premier ministre des personnages issus des bancs des services secrets? - les Etats-Unis bien sur jouent le jeu de l'attentisme, histoire de bien mettre à l'abri leurs intérêts et de protéger leurs arrières, y compris ceux d'Israël.

Pendant ce temps là ils permettent la montée de fronts qui s'opposent dans la rue et donc dans la violence, la radicalisation des revendications et donc la montée des mouvements intégristes comme le Frères Musulmans, l'installation d'un climat de guerre civile qui ne devra être matée que dans le sang, puisqu'elle sera notamment menée par des opposants islamistes, donc terroristes... In fine la boucle sera bouclée quand soit l'armée égyptienne aura elle-même renversé Moubarak, à ce stade là aucun partenaire n'a plus d'allié, et ce serait une solution logique pour les intérêts américains, puisque l'armée égyptienne est en partie financée par eux, soit les Etats-Unis interviendront au nom de je ne sais quelle nouvelle guerre contre un nouveau supposé Al Kaida...

A voir les Européens s'inquiéter soudainement de la tournure que prennent les évènements ces derniers jours et presser ceux qui sont au bord de la rupture d'entreprendre rapidement la transition, déclaration commune des cinq chefs de file de l'Euroland, (Appel européen pour une “transition rapide” en Egypte - yahoo.com - Egypte : Moubarak pressé de toutes parts vers la sortie - nouvelobs.com), pression depuis quelques jours sur le compagnies aériennes pour la transmission des données dans la lutte anti-terroriste (EU sets sights on bloc-wide air passenger data sharing - dw-world.de), quand le Parlement européen, avec plusieirs trains de retard, parce qu'on n'en est plus à la Tunisie..., lui aussi se fend d'une déclaration qui remet en cause la politique étrangère de l'UE et exige de la Commission européenne l'urgente nécessité de revoir la politique européenne de voisinage et de réviser "sa politique de soutien à la démocratie et aux droits de l'homme en mettant en place un mécanisme permettant la mise en œuvre de la clause de droits de l'homme dans tous les accords avec les pays tiers", (Solidarité avec les manifestants tunisiens et politique étrangère en question)* on peut effectivement craindre que la situation ne pourrait qu'empirer.

Ce n'est par ailleurs pas anodin ni par hasard que l'on entende Merkel, Sarkozy, Cameron, Zapatero et Berlusconi, ces cinq états sont sans doute ceux qui concentrent la plus forte population immigrée de la région de l'Afrique du Nord, depuis le Maroc jusqu'à l'Egypte, en suivant le pourtour méditerranéen, jusqu'à la Turquie, nos intérêts ne sont pas seulement là-bas mais aussi chez nous, sans doute plus vulnérables en cas de flambée des conflits.

Les Européens ont-ils compris l'urgence? Ont-ils compris que les Etats-Unis ne partageaient absolument pas les mêmes interêts? Ce soir un autre prétendant vient de renoncer à ses rêves de gloire et de pouvoir, le président Saleh renonce "définitivement à un amendement constitutionnel qui lui aurait ouvert une présidence éternelle..." (Yémen : Ali Abdallah Saleh abandonne le pouvoir - levif.be). Ce soir l'ONU a quitté le Caire (L'ONU évacue son personnel d'Egypte)...

Marianne Ranke-Cormier
O3/02/2011

* cette déclaration révèle dans toute sa splendeur toute la limite des pouvoirs de nos députés européens, qui en sont réduits à la simple expression de déclarations générales (mais c'est un autre sujet)



Mariann Ranke-Cormier est rédacteur en chef Newropeans magazine 
http://www.newropeans-magazine.org

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