L'information n'occupe que 3 lignes du long bilan de 75 pages publié la semaine dernière par la présidence de la République. Et pourtant, c'est une réussite française particulièrement remarquable face à l'épreuve sans précédent de la crise financière. Contrairement à ce que croient la plus grande partie de nos concitoyens, l'aide massive consentie par l'Etat aux banques en 2008-2009 n'a rien coûté aux contribuables ; elle a même rapporté 2,5 milliards d'intérêts financiers à l'Etat ! Voilà qui fait justice de l'accusation trop facilement lancée contre un pouvoir qui aurait dépensé sans compter au profit des banquiers et au détriment d'objectifs sociaux plus immédiats !
Ce résultat s'apprécie d'autant mieux si on le compare à ceux de nos partenaires, publiés au même moment par la Commission européenne. Seul, l'Etat espagnol présente un bilan créditeur, moitié moindre, et encore provisoire dans l'attente du sauvetage des caisses d'épargne régionales. En revanche, les contribuables ont été sollicités à hauteur de 15 milliards au Royaume-Uni, 16,5 milliards en Allemagne et de plus de 37 milliards dans la malheureuse Irlande.
Cette réussite est à mettre au crédit de la lucidité et du sang-froid des autorités françaises. En même temps, elle témoigne de la qualité de la gestion des banques françaises, comparée aux autres banques européennes et, a fortiori, aux folies de leurs homologues d'outre-Atlantique : à l'exception de Dexia, les institutions financières de l'hexagone n'ont eu besoin que de garanties ou d'avances de trésorerie pour surmonter la période folle de gel complet des crédits au niveau mondial. Dès que la circulation sanguine de la finance planétaire s'est rétablie, elles ont pu rembourser la totalité des concours qui leur avaient été accordés, en en payant le juste prix.
Elogieux pour la France, ces résultats comparés nous aident aussi à comprendre l'extrême sensibilité des opinions publiques allemande et anglaise à l'égard de tout nouveau projet d'aide à quelque acteur économique que ce soit et notamment aux Grecs, aux Irlandais ou aux Portugais. Ayant déjà dû payer pour les frasques de leurs propres banques, qui semblaient pourtant si respectables, les contribuables d'outre-Rhin et d'outre-Manche sont convaincus qu'à plus forte raison les prêts accordés aux Etats impécunieux de moindre réputation ne seront jamais remboursés.
En cette période de sortie de crise, le financement des déficits publics vient en concurrence avec celui des investissements d'avenir. Le fait que la France l'aborde avec des institutions financières nationales renforcées par rapport à celles de ses partenaires et concurrents est un précieux atout. Ne le minimisons pas, ni vis-à-vis des marchés financiers, ni vis-à-vis des électeurs !
Paru sur le site d'Alain Lamassoure le 8 mai 2011
Alain Lamassoure, est ancien ministre français des Affaires européennes puis du Budget, ancien membre de la Convention européenne. Actuellement député européen (Parti populaire européen, PPE), il est vice-président de la délégation française du groupe PPE et Président de la Commission des Budgets du Parlement européen.
http://www.alainlamassoure.eu