par Patrick Martin-Genier, le jeudi 30 juin 2011

C'est à une cérémonie très émouvante qu'étaient conviés de nombreux invités la semaine dernière à l'Hôtel de Beauharnais, résidence de l'Ambassadeur d'Allemagne en France, pour la remise du prix Adenauer-de Gaulle aux deux célèbres compositeurs et chefs d'orchestre, Pierre Boulez et Kurt Masur.


Ce prix était remis conjointement par Werner Hoyer et Laurent Wauquiez respectivement ministres allemand et français des affaires européennes également secrétaires généraux pour la coopération franco-allemande. Laurent Wauquiez fit l'éloge de Kurt Masur tandis que Werner Hoyer se chargeait de celui de Pierre Boulez, outre des intermèdes musicaux à la hauteur de l'événement.

Une carrière au service de la paix

Chef d'orchestre né en 1927, Kurt Masur fut notamment directeur musical de l'orchestre de Leipzig de 1970 à 1996, du Philharmonique de New-York de 2000 à 2007 et depuis 1992 de l'Orchestre philharmonique d'Israël. Il fut à la tête de l'Orchestre national de France de 2002 à 2008. Le ministre Laurent Wauquiez a salué le parcours humaniste hors norme du maestro qui faillit perdre la vie au front en 1944. Adepte de la non-violence, Kurt Masur a, lors de la chute du mur de Berlin, exhorté les peuples et les autorités à faire preuve de calme afin que les deux Allemagnes puissent se réconcilier sans violence. Admirateur de Paris, où « la culture côtoie le drame », Kurt Masur a fait part de l'émotion qu'il ressent à chaque fois qu'il vient dans la capitale.

Il n'est plus besoin bien sûr de présenter Pierre Boulez. Compositeur et chef d'orchestre né en 1925, il a créé le Domaine musical et a été chef d'orchestre symphonique de la BBC et du Philharmonique de New York. Il a aussi été à l'origine de l'IRCAM (Institut de recherche et coordination acoustique/musique) et fut ensuite nommé professeur au collège de France.


Lutter contre les fractures de l'Histoire : la présence de Simone Veil

Pour les ministres français et allemands, la rencontre de ces deux géants de la musique « fait sens » car "l'Europe constitue avant tout une lutte contre les fractures de l'histoire". Avec humour, Pierre Boulez s'est dit étonné "de voir associer son nom à celui de de Gaulle et Adenauer". Tous les intervenants ont souligné que la France et l'Allemagne sont aujourd'hui au cœur de l'Europe.

Cette cérémonie enfin n'aurait pas été ce qu'elle a été sans la participation exceptionnelle de Simone Veil, présente avec son mari, qui, après avoir subi les souffrances de la déportation, restera à jamais le symbole de la réconciliation franco-allemande. Sa présence à cette cérémonie a également fait sens car il est important que, pour les futures générations, les hommes et les femmes puissent se rassembler autour de valeurs communes telles que la tolérance et la connaissance de l'autre, à travers la musique notamment, un art si propice au rapprochement.

Cette cérémonie fut enfin suivie d'un cocktail dînatoire où les jeunes diplomates des deux pays ont pu échanger, discuter, échafauder des projets communs, car, demain, ce sont eux qui seront aux commandes.


Patrick Martin-Genier est Maître de conférences à Sciences-Po Paris, spécialiste des questions européennes


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