Une fois de plus, les chefs d'Etat et de gouvernement, réunis à l'initiative d'Herman Van Rompuy, son président permanent, ont réussi à sauver la Grèce d'un désastre économique et financier mais aussi d'une Bérézina sociale.
Des négociations difficiles à Berlin
La solution n'était pas évidente puisque Nicolas Sarkozy, arrivé un jour avant à Berlin avait dû batailler ferme avec Angela Merkel la chancelière allemande que l'on dit plus préoccupée par la défense des intérêts économiques allemands en Afrique et en Asie que par la pertinence de l'aide à la Grèce
Nicolas Sarkozy et Angela Merkel sont ainsi parvenus à une positon commune tard dans la nuit, sans que cet accord ne rallie forcément Jean-Claude Trichet, le gouverneur de la banque centrale qui avait été convoqué également plutôt que convié à cette réunion bilatérale.
Mais il est vrai que la banque centrale européenne étant une institution indépendante, il n'était pas possible en cette qualité d'associer son président à une position qui était politique et qui devait être présentée au conseil européen de Bruxelles le lendemain.
Dans la capitale belge, cet accord franco-allemand l'a finalement emporté faute d'alternative et malgré les quelques voix qui s'étaient élevées sur une éventuelle taxe sur les banques, qui n'a pas été retenues en fin de compte.
Des financements publics et privés
Il est très clair que les financements publics vont avoir un rôle majeur dans le règlement de la question de la dette grecque et heureusement d'ailleurs. Il n'eut pas été concevable d'imposer au seul secteur privé de contribuer à la résorption de la dette. Avec 109 milliards annoncés d'aide publique à la Grèce, dont 15 milliards pour la France, outre une participation du secteur privé grec, les moyens sont donc désormais mobilisés pour permettre à ce pays de se remettre sur une trajectoire saine et durable du moins il faut l'espérer.
Sur ce point il serait pour le moins salutaire que l'opposition au premier ministre grec au parlement fasse preuve d'un minimum de responsabilité en se ralliant à des mesures qui sont de toute façon inévitable, même si cela ne doit pas naturellement empêcher le débat démocratique.
Les chefs d'Etat et de gouvernement ont également permis que les prêts qui seront accordés à la Grèce puissent être remboursés sur une plus logue période, notamment pour ceux qui seront attribués sur la période 2011-2014.
Un mécanisme étendu aux autre pays
Allant plus loin, les responsables politiques ont également voulu dire que les mécanismes et facilités qui seraient mis en uvre pour la Grèce le seraient aussi pour tout autre pays qui pourrait être concernés, en premier lieu l'Irlande et le Portugal. La situation est grave a dit le président de la Commission européenne qui est aussi un ancien premier ministre portugais. A situation exceptionnelle moyens exceptionnels.
Certes, il n'empêche que les pays concernés et tous les pays de la zone euros devront avoir retrouvé un déficit inférieur à 3% du PIB en 2013 ou 2014, ce qui va entraîner des sacrifices importants, notamment pour les populations qui ne devront plus compter sur la générosité de feu "l'Etat providence". Cela annonce des restrictions que les gouvernements en place ou ceux qui sont susceptibles d'arriver ne pourront échapper. Des choix fiscaux seront donc à faire également
Une nouvelle gouvernance : oui, mais laquelle ?
Enfin last but not least comme disent les Anglais, le président de la République a annoncé que de nouvelles règles de gouvernance de la zone euro seront mises en place. Herman Van Rompuy a été chargé de formuler des propositions au mois d'octobre. C'est à l'occasion de ces propositions de nouvelle gouvernance que seront probablement révélées les vraies intentions des principaux pays de l'Union européenne. S'agira-t-il de renforcer le poids des seuls pays de l'Eurogroupe ? Faut-il s'attendre à une initiative sans précédent d'intégration fonctionnelle et fédérale pour renforcer le poids de l'action commune ? Ou pourrait-il s'agir d'une solution visant à donner le pouvoir aux seuls plus grands pays ? Le président de la République française semble être celui qui jouera un rôle majeur dans ces nouvelles propositions.
Hasard du calendrier ou pas, il sera alors en plein campagne pour sa réélection. Il a déjà annoncé à ses troupes qu'elles devaient faire connaître haut et fort que c'est grâce à son action personnelle que la Grèce a été sauvée et par delà ce pays, l'Europe
Le mérite de cette situation, au moins, c'est que l'on parlera de l'Europe. Le parti socialiste aussi sera en première ligne puisqu'il pourrait se retrouver lui-même dans quelques mois aux manettes du pays
Patrick Martin-Genier est Maître de conférences à Sciences-Po Paris, spécialiste des questions européennes.