par Patrick Martin-Genier, le mercredi 31 mars 2010

La crise économique et financière qui a frappé le monde depuis l'année dernière a fait voler en éclats les grands principes communautaires et parmi les plus importants, celui du respect des règles du traité.


La crise économique a bon dos…

En fait et depuis le traité de Masstricht, certains Etats ont éprouvé de grandes difficultés à faire respecter les critères concernant le taux d'endettement et le niveau de déficit public tant il est vrai qu'un budget équilibré apparaît aujourd'hui comme une bizarrerie tant économique et politique que juridique.

Peu nombreux sont les Etats qui, jusqu'à aujourd'hui, ont eu le courage de rappeler aux uns et aux autres les règles contenues dans le traité. Il a fallu la quasi-cessation de paiement de la Grèce pour que l'Allemagne mette les pieds dans le plat et mette un coup d'arrêt à ce qu'elle considère comme étant l'incarnation d'une politique budgétaire laxiste. L'épisode grec a constitué la goutte d'eau qui a fait déborder le vase.

Les divergences d'appréciation et les malentendus, notamment entre la France et l'Allemagne, qui couvaient depuis un certain temps, viennent ainsi d'éclater au grand jour. En quelques jours, Angela Merkel s'est ainsi haussée au niveau de la stature de Margaret Thatcher à qui restera collée l'expression : "I want my money back". Angela Merkel pourrait ainsi rester, même si elle n'a pas prononcé ces termes de façon expresse, comme celle qui aura dit "kein Geld für Griechenland" ( par d'argent à la Grèce)…

Le Traité pose de règles strictes

Car sans le dire vraiment, c'est en fin de compte la position prise par la chancelière qui, sans renoncer sine die à aider la Grèce, a mis de telles sauvegardes que le Fonds monétaire international, autrefois honni, sera en première ligne pour venir à la rescousse d'un pays qui, il faut bien le reconnaître, a été incapable ne serait-ce que de naviguer à vue à défaut de mettre en place des systèmes automatiques de sauvegarde de ses finances publiques.

Mais le respect des traités ne serait-il pas la première forme de respect de l'Europe et de la poursuite de la construction européenne ?

Justement, le traité sur l'Union européenne pose le principe directeur de finances publiques et de conditions monétaires saines (article 119). En vertu de l'article 126, "les Etats membres évitent les déficits publics excessifs" et il appartient à la commission européenne de surveiller l'évolution de la situation budgétaire ainsi que le montant de la dette publique en vue de "déceler les erreurs manifestes". Précisément, ne sommes-nous pas en train aujourd'hui d'évoluer vers des déficits publics excessifs et un montant manifestement disproportionné de la dette au regard des critères du traité, faisant preuve d'un manque total de responsabilité ?

Revenir à une plus grande rigueur

Il est vrai aussi que la Commission européenne a été incapable, lors des deux dernières années, de faire respecter les dispositions communautaires face à des Etats décidés à faire peu de cas des règles posées par les traités alors que, toujours selon le traité, la commission européenne est chargée de faire respecter le Traité. Il faut dire que José Manuel Barroso a pendant cette période été plus préoccupé par sa propre reconduction que par le devoir qui était le sien de rappeler aux Etats membres leurs obligations.

Il est donc temps aujourd'hui de revenir à une plus grande orthodoxie budgétaire. Continuer comme avant reviendrait à ruiner les chances de continuer vers une Europe plus forte économiquement et politiquement. Un euro affaibli, même s'il peut d'une certaine façon stimuler les exportations européennes, n'en constituerait pas moins un signe inquiétant de l'affaiblissement de l'Europe.



Patrick Martin-Genier est Maître de conférences à l'institut d'études politiques de Paris, expert des affaires européennes.

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