par Patrick Martin-Genier, le samedi 21 mars 2009

La campagne pour les élections européennes est bel et bien partie. En intronisant Michel Barnier, un européen convaincu et sincère et Rachida Dati, une ministre people issue de la diversité, comme têtes de liste en Ile-de-France, le président de la République a fait un bon casting.


Cependant le danger est là : la tentation, pour les partis politiques, s'agissant d'un scrutin proportionnel, est d'attirer les stars et les personnalités médiatiques les plus à même d'attirer les voix des électeurs. Ce faisant, il ne faudrait pas que ces élections se transforment en une course aux voix sans aucune signification sur le plan politique.

Une deuxième tentation existe aussi malheureusement. : le mode de scrutin proportionnel laisse entre les seules mains des appareils politiques le pouvoir de placer telle ou telle personnalité en place éligible. Autrement dit, ce sont tout d'abord les courants politiques qui l'emportent sur la sincérité de l'engagement européen, comme vient hélas de le montrer les laborieuses tractations au sein du parti socialiste où certains responsables régionaux se sont purement et simplement rebellés contre la composition des listes.

Force est aussi de constater que le siège de député européen est souvent considéré en France comme une sorte de lot de consolation faute, pour l'intéressé, d'avoir obtenu autre chose. Le refus de Rama Yade de se présenter pour un siège à Bruxelles est révélateur de cet état d'esprit. Alors que la capitale européenne n'est qu'à une heure vingt de Paris et qu'un siège de députée européenne lui aurait enfin de compte donné une marge de manœuvre politique importante, Mme Yade s'accroche à un secrétariat d'Etat aux droits de l'homme dont l'efficacité a été contestée, en premier lieu par son ministre de tutelle…

Cependant et comme le dit régulièrement le président de la République qui a lui-même vécu une présidence de l'Union européenne pleine de rebondissements, l'Europe constitue une priorité. Mais quelle Europe, dès lors que tout le monde se dit européen ? Il serait ainsi pertinent d'aborder pendant cette campagne, la conception européenne du chef de l'Etat, qui n'est pas forcément celle des autres Etats de l'Union européenne, Nicolas Sarkozy ayant de facto constitué un directoire européen par-delà les petits pays, y compris la présidence tchèque réduite à faire de la figuration pendant les récents affrontements violents entre Israël et le Hamas dans la bande de Gaza ou à l'occasion de la discussion sur les meilleurs moyens de lutter contre la crise économique….

Il est donc indispensable de mettre les partis politiques et les candidats aux élections face à leurs responsabilités.

Le Parlement européen est aujourd'hui une enceinte fondamentale pour l'évolution de la législation. Une part significative de la législation nationale est complètement impactée par le droit communautaire, qu'il s'agisse du droit de la concurrence, de la libre circulation des marchandises et des travailleurs. Est-on par exemple conscient du fait que dans une dizaine d'années, le statut général des fonctionnaires pourrait être réduit à une peau de chagrin au nom de la libre circulation des salariés dans l'Union européenne ? La même influence fondamentale s'exerce dans les domaines des services financiers et d'assurances ( donc des retraites et pensions), de l'environnement, de la protection des consommateurs. Par suite, si la France souhaite défendre une certaine conception du service public et de la vie en société, il est indispensable de s'assurer que les futurs élus à Bruxelles et Strasbourg seront effectivement très présents et ne borneront pas, comme certains au cours de la précédente législateure, à un superbe absentéisme qui n'est pas sanctionné par la perte d'indemnités…

Le cumul des mandats constitue en outre un véritable fléau : si aujourd'hui Strasbourg est en perte de vitesse pour le siège du Parlement européen, on le doit à un lobbying extrêmement efficace de parlementaires, belges et anglais entre autres, en comparaison duquel l'amateurisme français est souvent consternant.. Presque plus personne n'est prêt à se battre pour le maintien du siège du Parlement à Strasbourg dont la séance plénière du début du mois de réduit en réalité à trois jours, même si personne n'ose le dire ouvertement.

Enfin, il faut aussi savoir qu'envoyer des élus anti-européens situés aux extrêmes de l'échiquier politique au Parlement européen sera contre-productif, puisque ces futurs élus seront marginalisés sans aucune possibilité d'influer le cours des évènements. Tout cela devra être dit clairement pendant la campagne. Il en va du respect des électeurs et du citoyen.





Patrick Martin-Genier est universitaire et secrétaire général de l'Association Jean Monnet

Organisations en lien avec Fenêtre sur l'Europe :