par Partick Martin-Genier, le samedi 24 octobre 2009

Tandis que le chef de l'Etat tchèque tire ses dernières cartouches d'opposant en chef au traité de Lisbonne, les esprits s'échauffent déjà à Bruxelles pour savoir qui deviendra le premier président permanent du Conseil européen.


Tony Blair : un candidat très controversé

Si différents noms circulent, l'un d'entre eux crée une dissension très sérieuse dans les milieux européens : l'ancien premier ministre britannique, Tony Blair.

Il y a quelques semaines, les pays du Benelux ont officiellement et conjointement fait savoir qu'ils ne verraient pas d'un bon œil l'accession de l'ancien premier ministre Tony Blair à ce poste, qui sera ce qu'en fera le premier titulaire.

Il y a quelques jours, plusieurs députés d'origines diverses ont lancé un projet de délibération du parlement européen destiné à dissuader les chefs d'Etat et de gouvernement de choisir leur ancien pair pour exercer cette fonction.

Enfin et pour couronner le tout, les conservateurs britanniques eux-mêmes s'y sont mis en faisant savoir, par le biais de l'entourage du probable futur premier ministre de Grande-Bretagne David Cameron, que Tony Blair ne serait pas un bon choix…

La guerre en Irak : un grave handicap

Il faut dire que l'ancien premier ministre traîne derrière lui un grave handicap : force est en effet de constater qu'il a été complice d'un des plus grands mensonges d'Etat depuis la fin de la seconde guerre mondiale et ce début du XXIe siècle, orchestré alors par George Bush qui était décidé à partir en guerre contre Saddam Hussein : l'existence d'armes de destruction massive dans ce pays…Un scientifique britannique de renom, mêlé malgré lui à cette affaire, fut même contraint au suicide.

Et, au lieu de faire amende honorable, Tony Blair s'acharna à mentir aux peuples et à l'Europe. Pendant que la France était traînée dans la boue aux Etats-Unis tant par les médias que par l'administration Bush, M. Blair était reçu avec tous les honneurs à Washington par un Congrès au garde à vous.

On ne s'étonnera pas dans ces conditions qu'un éditorialiste du New York Times ait récemment pris position pour Tony Blair dans l'accession à la présidence de l'Europe…

Trouver une personnalité plus consensuelle

Il n'est pas possible de mentir ainsi, de tout faire oublier et de se faire passer pour un bon européen après n'avoir finalement défendu que les intérêts de son pays et les "liens spéciaux" de ce dernier avec les Etats-Unis

Car Tony Blair était arrivé au pouvoir auréolé d'un prestige particulier : le nouveau premier ministre était l'un des plus européens de son histoire…Quittant le pouvoir dix ans après, on put s'apercevoir qu'il ne fit pas plus que les autres, voire même moins bien si l'on compare à Edward Heath qui fit entrer son pays dans le Marché commun en 1973.

En effet, l'Europe a besoin d'une personnalité plus consensuelle qui soit capable de porter les couleurs de l'Europe sans confondre celle-ci avec les intérêts de son pays ou une activité de lobbying comme une autre. Que Tony Blair ait des capacités de lobbyiste est incontestable si l'on en croit la façon dont il a procédé pour obtenir que son pays soit choisi comme futur site des Jeux olympiques. Mais cela ne suffit pas.

D'autres personnes ont à la fois la capacité d'exercer cette mission et la sagesse nécessaire : on peut citer l'ancien premier ministre espagnol Felipe Gonzalez, Joschka Fischer, ancien vice-chancelier allemand, Vaclav Havel, ancien chef de l'Etat tchèque, ce qui serait un formidable pied de nez à Vaclav Klaus actuel chef de l'Etat tchèque, anti-européen schizophrène ou d'autres hommes et femmes de ce profil ; ces personnalités présentent toutes une apparence de sérénité, la compétence voire un certain romantisme. L'Europe, c'est aussi une âme !

Seulement voilà, Tony Blair est soutenu par …Nicolas Sarkozy et Silvio Berlusconi, entres autres…Mais il serait dommageable pour l'Europe que le premier président européen soit un facteur de division.



Patrick Martin-Genier est maître de conférence à l'Institut d'études politiques de Paris

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