Qui sera le futur président de l'Union ?
Le traité de Lisbonne prévoit sa désignation pour un mandat de deux ans et demi, renouvelable une fois, de façon à personnifier l'Europe aux yeux des peuples. Nommé par ses pairs, il ne pourra plus exercer de mandat national et coordonnera les travaux du Conseil européen dans la durée, contrairement aux présidents actuels qui se succèdent tous les six mois
Alors que le long processus de ratification du nouveau traité ne fait que commencer, les esprits s'agitent dans les capitales des vingt-sept Etats membres. Il faut dire que la question du futur président de l'Union est moins anxiogène que la crise des marchés financiers ou les prévisions en baisse de la croissance européenne !
Il a suffi que l'ancien Premier ministre britannique Tony Blair vienne à Paris à l'invitation de Nicolas Sarkozy et de l'UMP pour que les supputations fleurissent comme colchiques dans les prés
Ce jeune retraité ambitieux, dynamique et expérimenté ne ferait-il pas un excellent président de l'Union ? Sa notoriété ne constituerait-elle pas un "plus" incontestable pour l'Europe ? Les candidats plausibles seraient-ils si nombreux ?
Les réactions n'ont pas tardé à fuser, négatives pour la plupart. En bons " pépés flingueurs", Valéry Giscard d'Estaing et Edouard Balladur ont été les premiers à dégainer. Un Britannique ? Et puis quoi encore ! La présidence de l'Union ne saurait revenir au ressortissant d'un pays qui n'est ni dans la zone euro, ni dans l'espace Schengen, qui se tient à l'écart de la Charte des droits fondamentaux et qui vient encore de négocier des dérogations en matière de coopération policière et judiciaire
Ces arguments sont solides. Mais M. Blair n'en compte pas moins de farouches partisans. Et, à les écouter, on ne peut pas s'empêcher de penser à que qu'écrivait en septembre dernier dans le magazine l'Expansion l'ancien eurodéputé Jean-Louis Bourlanges : "Il y a un parallélisme entre l'accumulation des dérogations consenties au Royaume-Uni et sa montée en puissance dans les instances communautaires (
) L'Union européenne paraît réveiller le fantasme de l'India Office. Trois mille Britanniques gouvernant 500 millions d'Européens, voilà qui fait rêver !"
Auditionné par la délégation pour l'Union européenne de l'Assemblée nationale le 16 janvier dernier, M. Giscard d'Estaing a répété que, selon lui, le futur président devra appartenir à un pays pleinement engagé dans la construction européenne sous tous ses aspects, ce qui exclut dans l'immédiat Tony Blair ou tout autre sujet de Sa Très Gracieuse Majesté. Mais l'ancien chef de l'Etat s'est aussi interrogé sur la procédure. Car personne ne connaît avec exactitude les modalités de désignation du futur président
Pour VGE, cette désignation devra être annoncée après un vrai débat démocratique et non pas à l'issue d'une simple réunion du Conseil. Cela suppose, dit-il, que l'élu soit en phase avec la majorité du Parlement européen, comme avec celle de son propre pays. La référence au Parlement européen est intéressante, car le traité de Lisbonne stipule cette fois en toutes lettres que les chefs d'Etat et de gouvernement devront tenir compte des résultats des élections européennes et se concerter avec les élus strasbourgeois avant de soumettre à leur investiture le président et les membres de la Commission.
Tout indique donc que l'année 2009 sera chaude car, après les élections européennes du printemps, il faudra choisir le président de l'Union, le président de la Commission et le président du Parlement européen
Sans oublier le Haut représentant pour les Affaires étrangères !
Pour ce poste de vrai-faux ministre, Javier Solana est toujours en piste, mais Michel Barnier se dit intéressé. Pour le Parlement, on sait que le groupe PPE et le groupe socialiste ont pris l'habitude de se partager le "perchoir". Pour la Commission, un second mandat de M. Barroso n'est pas à exclure. Reste à attribuer le troisième poste
Des noms circulent : Tony Blair, bien sûr, mais aussi Felipe Gonzales, Carl Bildt, Mario Monti, Martti Ahtisaari ou Jean-Claude Juncker.
Les paris sont ouverts.
Encore faut-il que le traité soit ratifié
Ancien rédacteur-en-chef au Figaro, maître de conférences à Sciences Po et à l'Isad. Il est aussi l'auteur d' "Angela Merkel"(Editions du Rocher, 2006) et, avec Jacques Barrot, de "L'Europe n'est pas ce que vous croyez" (Albin Michel, 2007).