par Baudouin Bollaert, le jeudi 13 janvier 2011

Alors que les pays de la zone euro croulent sous les dettes et les déficits, la Chine vient une fois de plus à leur rescousse… Les dirigeants de l'Empire du milieu adorent revêtir, depuis quelques mois, la panoplie du chevalier blanc – on devrait plutôt dire "chevalier jaune" – pour jouer les sauveurs de l'Europe et de sa monnaie unique.


Après avoir racheté le port d'Athènes et une partie de la dette grecque, après avoir promis un soutien analogue au Portugal, la Chine communiste vient de signer une quinzaine de contrats en Espagne pour la bagatelle de 5,65 milliards d'euros. A qui le tour ?

Les dirigeants chinois n'ont rien de philanthropes. Mais la faiblesse des uns faisant la force des autres, ils poussent leurs pions, étendent leur influence, tissent un vaste réseau de pays "obligés" tant il est vrai qu'on ne mord pas la main de celui qui vous nourrit…

Qu'ils interviennent en Afrique pour diversifier leurs approvisionnements en énergie, aux Etats-Unis pour soutenir la consommation des Américains en achetant des bons du Trésor ou en Europe pour éviter la faillite de l'Euroland, ils se comportent pour ce qu'ils sont : les premiers banquiers de la planète avec, dans leurs coffres, 2600 milliards de dollars de réserves de changes.

Faut-il s'en offusquer ? La Chine, comme l'Inde ou le Brésil, a la chance d'avoir des universités performantes, des élites pointues, un marché intérieur immense et une main d'œuvre peu coûteuse… Elle en tire tout naturellement les bénéfices.

L'Union européenne, avec sa croissance économique anémique, son chômage récurrent, sa démographie chancelante et ses éternelles divisions, a de quoi s'inquiéter. D'autant qu'au risque de couper la branche sur laquelle elle est assise, elle doit souvent accepter les transferts de technologie exigés par son généreux donateur asiatique…

Pourtant, tout est-il si noir dans le ciel européen ? Pas forcément. De la même manière qu'après la seconde guerre mondiale les Etats-Unis étaient accourus au secours du vieux continent avec le plan Marshall, la Chine vient aujourd'hui à l'aide de la zone euro car les dix-sept pays qui la composent représentent une grosse partie de ses débouchés commerciaux et que Pékin n'entend pas dépendre uniquement du billet vert.

Comme les Etats-Unis hier, la Chine sait qu'elle n'a rien à gagner à une Europe déliquescente. L'Union a beau terriblement décevoir ceux qui voudraient la voir plus forte et conquérante, elle demeure attractive. Malgré les coups de boutoir de la mondialisation, son modèle d'intégration consentie n'a pas dit son dernier mot.

Des ruines de la seconde guerre mondiale était né le projet de construction de l'Europe, porté par Jean Monnet, Robert Schuman, Alcide de Gasperi, Konrad Adenauer et bien d'autres… On aimerait croire que des ruines d'un laxisme financier mortifère naîtra une Union européenne plus unie et responsable.


Baudouin Bollaert est ancien rédacteur-en-chef au Figaro. Enseignant à l'Institut catholique de Paris. 

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