par Patrick Martin-Genier, le mercredi 26 janvier 2011

Le président de la République a eu l'occasion de l'affirmer à plusieurs reprises : la crise économique et monétaire engendré par la faillite de la Grèce et l'Irlande, a failli faire sombrer non seulement la zone euro tout entière, mais aussi l'Union européenne elle-même. A cette occasion, les Etats ont réagi avec une rare célérité tant les chefs d'Etats et de gouvernement ont pris conscience que l'absence de réponse politique à cette crise majeure signifierait non seulement la ruine de la monnaie unique mais aussi la fin de tout espoir de poursuite de la construction européenne. Malgré les divergences initiales entre la France et l'Allemagne sur le montant des sommes à consacrer au renflouement des Etats concernés et les modalités de contrôle de leurs politiques économiques, un choix politique a été fait : celui de faire jouer la solidarité, quitte à imposer aux Etats en difficulté une cure d'austérité sans précédent. Ce réflexe de survie a été déterminant.


Les priorités françaises pour l'Europe

Dans la foulée, le ministre des affaires européennes, Laurent Wauquiez a, le 24 janvier dernier lors de la rencontre avec le ministre organisée par le Cercle des Européens (http://www.ceuropeens.org), en coopération avec un grand hebdomadaire national, indiqué ce qu'étaient les priorités du gouvernement pour l'année à venir : l'intégration fiscale et la coopération pour l'innovation technologique.

Il a ainsi insisté sur l'importance que la politique commerciale européenne ne soit plus naïve et que l'Europe soit en situation de gagner un bras de fer avec les autres pays qui bénéficient du marché unique européen sans pour autant en faire profiter les entreprises européennes dans leurs pays respectifs.

G8/G20 : retrouver l'élan de la présidence française de l'UE

Cette intervention avait lieu au lendemain de la conférence de presse du président de la République qui avait ainsi lancé son action à la tête des G8 et G20, enceinte en effet cruciale sur le plan de la gouvernance mondiale au cours de laquelle le président de la république n'avait guère mis en avant l'Europe comme entité politique unique capable de présente rune sort de front uni pour ne pas laisser croire que l'Europe ne serait qu'un club de riches faisant valoir ses propres intérêts face aux autres Etats plus pauvres…

Pour Laurent Wauquiez, il s'agit par la présidence du G8 et G20, de retrouver l'élan de la présidence française de l'Union européenne, donc de faire avancer sensiblement les dossiers européens avec un réel enthousiasme, dont on souhaiterait en effet qu'il soit partagé par les Français.

Travailler l'identité européenne

Mais il n'a pas pour autant occulté les difficultés : l'Europe a besoin d'âme et il devient urgent de définir, à défaut d'identité nationale, ce que devrait être l'identité européenne que la Commission européenne semble bien incapable, selon lui, de défendre. Le ministre des affaires européennes appelle ainsi de ses vœux la constitution d'une "base civilisationnelle" de l'Europe qui permettrait de retrouver des moments historiques très fort que sont les racines chrétiennes de l'Europe -qu'il assume fortement-, le siècle des lumières, les grands principes que sont l'égalité homme femme et la démocratie. Tout cela permettrait ainsi de "mettre de la chair autour d'un squelette"…

Une autre grande difficulté pour l'Europe est la suivante : doit-elle, pour plus d'efficacité, aller vers plus d'intégration et laquelle ? Ou doit-elle, comme cela semble se dessiner aujourd'hui, resserrer ses rangs autour de quelques grands Etats qui seraient destinés à mener le bal d'une Europe qui ne semble plus guère avancer à l'unisson des vingt-sept membres ?

Or aujourd'hui, il est nécessaire malgré tout, de ne pas abandonner l'idée d'une nouvelle réflexion intensive et prospective sur la vision de l'Europe à vingt ans.

Alors que la France est décrite aux Etats-Unis comme un pays "déclinant", il n'y a pas d'autre choix que de réaliser à moyen terme, c'est-à-dire dans un délai compris entre cinq et dix ans, un saut qualitatif vers plus d'intégration. Non seulement sur le plan économique et monétaire où la logique fédérale s'est déjà imposée, mais également sur le plan de la défense - il s'agit là d'un impératif majeur-, et de la diplomatie internationale.

Une volonté politique sans faille

A cette fin, il faut une volonté politique sans faille au moment où se mettent en place à Bruxelles les nouvelles institutions en devenir : le conseil européen permanent mais aussi le Parlement européen dont les nouveaux pouvoirs lui confèrent des responsabilités particulières qu'il doit honorer.

En voulant faire de 2011 un "moment Monnet" et en souhaitant que la présidence française des G8 et G20 permette de "retrouver l'élan de la présidence française", le ministre Wauqiez a souhaité montrer la détermination du Président de la République. Souhaitons que les résultats soient à la hauteur des enjeux, même si, il faut le souligner, la construction européenne devra se poursuivre à marche forcée après les grandes échéances politiques de 2012.


Patrick Martin-Genier est Maître de conférence à l'Institut d'études politiques de Paris, spécialiste des questions européennes.

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