par Mario Monti, le vendredi 13 mai 2011

Le Plan d'action pour le Marché unique adopté le 13 avril 2011 à l'initiative de Michel Barnier, marque une étape importante dans l'évolution de la stratégie politique pour l'intégration ainsi que pour la croissance économique et sociale de l'Union européenne.


Le Président de la Commission, José Manuél Barroso, au moment même où il était candidat à un deuxième mandat, avait annoncé qu'il ferait de la relance du Marché unique une de ses priorités. Afin de disposer d'une base pour formuler une stratégie d'ensemble à cet égard, il m'avait confié la mission de préparer un rapport indépendant.

Après avoir consulté les institutions européennes et les différents stakeholders de la société civile, ce rapport lui fut remis au mois de mai 2010. Sur cette base, ainsi que sur celle du rapport Grech, Michel Barnier a mis en chantier un vaste travail politique et technique qui a permis à la Commission d'adopter en octobre 2010 un texte préliminaire de SMA, soumis à consultation pendant quatre mois et finalement, un texte final le 13 avril dernier,

Il s'agit d'un document issu d'une coordination politique au sein de la Commission, sous l'égide du Président Barroso et du Commissaire Barnier, et avec la coopération directe d'une douzaine de Commissaires compétents. C'est l'approche sur laquelle je m'étais permis d'insister dans mon rapport, sans laquelle le Marché unique risquerait de rester fragmenté et cela à deux niveaux : sur le terrain mais aussi en amont, au sein de la Commission Européenne. Celle-ci doit être le poste de pilotage politique pour donner de l'élan au Marché unique et le défendre, par des interventions cohérentes et proactives, des menaces multiples auxquelles il a été confronté ces dernières années, et va sans aucun doute l'être encore à l'avenir, face aux nationalismes montants un peu partout en Europe.

Je souhaite me féliciter avec Michel Barnier - avec qui j'eus le plaisir de travailler au sein de la Commission Prodi– pour avoir mené à bien une initiative très complexe et sensible. Au travers des 12 mesures présentées comme prioritaires, mais aussi par plusieurs autres démarches sur lesquelles la Commission va travailler parallèlement, le SMA a l'ambition – me parait-il –de “réconcilier le marché et le social”, selon l'exigence que j'avais identifié comme centrale au printemps 2009. Un malaise vers l'intégration et plus récemment, suite à la crise financière, un malaise vers le marché lui-même, avaient provoqué une hostilité croissante des citoyens ainsi que des forces politiques et sociales envers le Marché unique.

Sans trop l'expliciter, le SMA propose en effet une sorte de deal, de nouveau compromis. Les pays avec une tradition plus liée à l'économie sociale de marché, tels que l'Allemagne ou la France, y trouveront la reconnaissance de certains de leurs soucis, par exemple en matière de services d'intérêt économique général, de marchés publics, de politique industrielle ou encore de coordination fiscale. En contrepartie, ils sont invités à procéder plus résolument dans la direction d'un Marché unique plus avancé dans les domaines des services, de l'énergie, de l'économie numérique, comme le souhaitent surtout les Pays avec une vision plus libérale, tels que le Royaume Uni ou les nouveaux Etats Membres. Sans en faire un objectif en tant que tel, ce processus rendrait les Etats Membres de l'une et de l'autre orientation un peu plus proches des pays nordiques, qui réussissent à combiner efficacement le respect pour le marché et la concurrence et un système moderne de protection sociale.

Il faut espérer que le Parlement européen et le Conseil travaillent rapidement en vue de l'adoption de l'ensemble des propositions du SMA. Pour donner une impulsion forte à ce processus, il serait fort souhaitable que l'une des prochaines sessions du Conseil européen soit consacrée à une prise de responsabilité politique sur le SMA directement par les Chefs d'Etats et de Gouvernement.

Publié dans Interfaces d'avril 2011 de Confrontations Europe


En 1994, Mario Monti il est nommé à la Commission européenne avec une autre compatriote, Emma Bonino, par le premier gouvernement Berlusconi. En qualité de commissaire européen à partir de 1995, il est responsable pour les secteurs « marché intérieur, services financiers et intégration financière, droits de douanes et taxes ».

Quatre ans plus tard, le gouvernement de Massimo D'Alema confirme en 1999 sa nomination au sein de la nouvelle Commission européenne sous la présidence de Romano Prodi. Il est commissaire responsable de la concurrence.

Le second gouvernement Berlusconi ne le confirma pas à son poste en 2004 et proposa Rocco Buttiglione à sa place. La nomination de ce dernier ayant été rejetée par le Parlement européen, le commissaire européen italien fut finalement Franco Frattini.

Mario Monti est actuellement président de l'université Bocconi de Milan et un responsable de Bruegel, un think tank européen fondé en 2005. Dès 2005 il est International Advisor pour Goldman Sachs.

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