par Pier Virgilio Dastoli, le mardi 13 septembre 2011

Le renforcement de l'Union européenne dans le sens d'une plus grande intégration économique et politique se trouve de plus en plus menacé. Si les États membres et les peuples européens ne s'engagent pas avec urgence dans la bonne direction, le risque est fort d'un retour à une Europe des nations en conflit les unes contre les autres, brisant ainsi 60 ans d'acquis et de succès communautaires (marché commun, libre circulation des personnes, politique agricole commune, paix, stabilité et prospérité, dont on mesure les bénéfices au regard des crises actuelles ailleurs dans le monde et souvent très proches de nous...).


Le Traité de Lisbonne, conçu et élaboré entre 2002 et 2007, a montré les défauts d'un compromis intergouvernemental, qui sont apparus encore plus évidents après la crise financière internationale.

Quelques mois après son entrée en vigueur, les gouvernements ont déjà décidé d'ouvrir une procédure de modification limitée du Traité afin de rendre pérenne le mécanisme de soutien aux pays de la zone euro, qui n'avait pas été prévu par le Traité et qui est apparu indispensable pour éviter son éclatement.

Cependant, les modifications décidées par les gouvernements ne sont ni en mesure de résoudre la question du gouvernement économique de l'Union européenne, ni appropriées pour répondre à la crise économique et sociale que traversent déjà plusieurs pays.

La proposition d'une réunion périodique des chefs d'États et de gouvernement de la zone Euro, avancée le 16 aout par le directoire franco-allemand, n'est pas en mesure d'assurer l'efficacité et le caractère démocratique du gouvernement économique dont l'Union européenne a besoin.

Par ailleurs, après le début des révoltes populaires dans un nombre croissant de pays arabes, les Européens ont montré leur incapacité à réagir en leur proposant une vision et une politique ambitieuse.

Dans ce contexte, le débat sur les deux voies alternatives pour l'avenir de l'Union européenne est relancé au sein de nombre de pays européens :

- la voie qui doit conduire l'Union européenne à parachever ce qui était l'objectif à sa création, sa finalité fédérale, et donc son évolution vers les États-Unis d'Europe, seuls à même de donner à l'Europe un poids dans le monde face aux grandes puissances et de modifier ensemble la trajectoire d'une mondialisation débridée en lui imposant des règles d'abord civiques, sociales, environnementales.

- le chemin du retour en arrière, aux revendications des intérêts nationaux laissant place à des affrontements entre des groupes, plus ou moins volatils, de pays.

La place inquiétante laissée à la seconde voie est aujourd'hui évidente (cf. l'absence de politiques économiques ou de sécurité communes, la montée des populismes et nationalismes divers, la mise en cause des immigrés, mais aussi la montée des “indignations”...).

Nous plaidons :

Dans une première étape : l'adoption en urgence d'un budget européen fondé exclusivement sur des ressources propres auxquelles il faudra ajouter les « Euro-obligations ». Donc capable d'assurer en même temps les fonctions d'allocation de ressources, notamment dans les domaines clés pour le futur de notre Europe, ceux de l'innovation, de la recherche, de l'énergie et de l'environnement, et les fonctions de redistribution propres à garantir la cohésion sociale et aussi territoriale interne et la solidarité externe, en premier lieu vers les pays de la Méditerranée méridionale. Il s'agit d'établir une politique de « Projets Européens Partagés » destinés à entrainer une croissance répondant à des critères d'efficacité sociale, environnementale, civique autant qu'économique et financière.

Un Fonds de développement et d'investissement public/privé devrait également soutenir cette ambition.

Nous proposons aussi que la politique d'aide au développement et des aides alimentaires devienne une compétence exclusive de l'Union européenne et qu'une vraie politique commune d'immigration soit finalement mise en place. Il faudra inscrire dans le budget européen les ressources aptes à doter l'Union européenne des moyens indispensables aux politiques européennes de maintien de la paix («peace keeping») et de consolidation de la paix («peace building»). Ces politiques ont déjà montré la valeur ajoutée de l'Union par rapport à d'autres États, y compris les États-Unis, dans de nombreuses opérations sur plusieurs continents.


Dans une deuxième étape


Il faut rassembler tous les pays et les peuples qui partagent le principe de la supranationalité et acceptent le modèle fédéral dans un système constitutionnel nouveau : les États-Unis d'Europe.

La méthode que nous soutenons est celle d'une Convention constituante se réunissant à l'automne 2014 et garantissant le rôle central du Parlement européen et associant la Commission européenne ainsi que les parlements et les gouvernements des pays prêts à accomplir un pas décisif vers les États-Unis d'Europe. Le texte issu de cette Convention serait soumis à un référendum paneuropéen.

L'agenda que nous suggérons est celui d'un avant-projet élaboré par le Parlement européen en temps utile avant le début de la campagne pour les élections européennes qui auront lieu en juin 2014 et une décision du Conseil européen au plus tard au début de la présidence italienne en juillet 2014. Face à la crise politique du projet européen, seul le Parlement européen sera en mesure de donner une réponse politique adéquate comme il l'avait fait en février 1984 avec le projet Spinelli.

Il faut oser plus d'Europe pour sortir de la crise tant sociale, économique que celle qui menace le fonctionnement même de nos démocraties.


Ancien collaborateur d'Altiero Spinelli et fonctionnaire européen, Pier Virgilio Dastoli préside la section italienne du Mouvement européen.

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