Tribune au nom de la Coalition pour la Roma Pride - engagée dans la lutte contre les discriminations envers les Roms, Tsiganes, Gitans et les Gens du voyage jeudi 29 septembre 2011, par POURIA AMIRSHAHI
L'été 2010 et son cortège de discours agressifs envers les Roms et les Gens du voyage sonna pour beaucoup comme une remise en cause de principes qui nous sont chers : le respect de la dignité de chacun et l'égalité pour tous.
Depuis trop longtemps, de nombreuses confusions sont volontairement entretenues entre catégories administratives, nationales, culturelles et entre Roms, Tsiganes, Gitans et Gens du voyage. Celles-ci fabriquent, pour mieux la désigner, une population qui serait homogène et viscéralement dangereuse pour la République. Nous refusons ces confusions et nous dénonçons le racisme et les discriminations qui visent plus particulièrement les individus ainsi stigmatisés.
Depuis trop longtemps, les pouvoirs publics nationaux, en France comme ailleurs sur le continent, instrumentalisent la dimension européenne de certaines problématiques pour se défausser de leurs responsabilités sur d'autres pays, notamment la Roumanie et la Bulgarie, ou sur les institutions européennes. Celles-ci sont de plus incapables d'intégrer la réalité de la situation des Voyageurs français.
Nous refusons cette instrumentalisation et nous exprimons la solidarité européenne des sociétés civiles.
Cette solidarité, nous voulons la construire comme un moment d'engagement partagé entre Roms, Tsiganes, Gitans, Gens du voyage, antiracistes et plus largement tous les citoyens militants pour l'égalité des droits. Une solidarité dans laquelle les revendications particularistes - dont nous connaissons le côté étouffant - n'ont pas leur place. Une solidarité qui, au contraire, se fonde sur l'égalité des droits et le respect de la dignité qui doit être reconnue à chaque individu.
Au regard de ce qui nous guide, cette première "Roma Pride", organisée simultanément dans de nombreux pays européens, de la Norvège à la Roumanie et de l'Italie au Danemark, sera l'occasion, dans une ambiance citoyenne, festive et revendicative, de réclamer :
1/ Le respect pour tous les Européens de la liberté de circulation, un des fondements essentiels de la construction européenne. Ceci implique notamment l'intégration de la Roumanie et de la Bulgarie dans l'espace Schengen, ce qui leur est aujourd'hui refusé en particulier pour pouvoir mieux expulser les Roms.
2/ La suppression de la loi de 1969, qui dessine un véritable "Code du Voyageur", et dont les trois dispositions - les unes plus iniques que les autres - sont :
- L'imposition d'une commune de rattachement pour les Voyageurs, avec un quota maximum de 3% de Voyageurs par commune.
- Des modalités très restrictives d'inscription sur les listes électorales (qui ne peut intervenir qu'à l'issue de 3 ans de rattachement à une même commune).
- La mise en place de titres de circulation, dont le carnet à faire viser tous les 3 mois en commissariat ou en gendarmerie.
Condamnée par feu La HALDE et même critiquée dans le récent rapport parlementaire du sénateur Hérisson, cette loi n'a évidemment plus sa place dans une République respectueuse du principe d'égalité et de sa Constitution.
3/ La reconnaissance de la caravane comme logement, et la réforme de la "taxe caravane", une taxe injuste puisque ne prenant pas en compte le niveau de revenus des Voyageurs qui y sont soumis.
4/ Le respect de la libre-circulation et du libre-stationnement pour les Gens du voyage, comme pour tous les autres citoyens, en particulier la possibilité de s'arrêter dans toutes les communes françaises. Ces droits sont aujourd'hui remis en cause puisque, en vertu notamment de la législation sur les aires de stationnement et en raison de la disparition des terrains municipaux ouverts au public, plus de 90% des communes sont interdites aux voyageurs, alors qu'une génération auparavant, il existait une possibilité de halte dans pratiquement tous les villages de France. Ces interdictions générales d'installation de caravanes doivent être proscrites dans les documents d'urbanisme des communes.
Pour nous, ces quatre revendications manifestent une volonté et un désir. La volonté de refuser que le mode de vie itinérant et l'habitat caravane soient réprimés dans notre pays. Le désir que le principe d'égalité ne soit pas une proclamation vide de sens pour une partie de nos concitoyens.
Le récent Sommet des maires pour les Roms et Gens du Voyage a conclu : "Nous affirmons de nouveau notre ferme conviction que l'avenir de la société démocratique européenne requiert l'inclusion et la participation de tous les Européens, y compris les Roms, à la construction de la démocratie et à la pleine vitalité de leurs collectivités, avec tous les droits et toutes les responsabilités que cela implique".
Voir aussi la vidéo de Fenêtre sur l'Europe :
http://www.fenetreeuropetv.com/video/display.php?video_id=400
Pouria Amirshahi est secrétaire national du parti socialiste à la coopération, à la francophonie et aux droits de l'Homme.
http://www.pouriaamirshahi.fr