par Patrick Le Hyaric, le vendredi 28 octobre 2011

"Ils tentent de nous faire croire qu'ils sauvent l'Europe, en fait, ils viennent au secours des ogres de la finance"


Pour la énième fois, au terme d'une longue tragicomédie, les dirigeants européens, au premier rang desquels M. Sarkozy et Mme Merkel, tentent de nous faire croire qu'ils sauvent l'Europe. En fait, ils viennent au secours des ogres de la finance. Ceux-là mêmes qui poussent la Grèce à la ruine, le peuple grec à la misère en réservant le même sort aux peuples portugais, irlandais, espagnol et italien. Quant à nos concitoyens, un nouveau plan de super austérité les attend. Chacun voit bien que de sommet en sommet, loin de reculer, la crise s'aggrave de jour en jour.

Le président de la République vient une fois de plus de passer sous les fourches caudines de Mme Merkel et du capital allemand, plus dominateur que jamais. Et les chefs d'Etats voudraient nous faire pleurer sur le sort des banques alors que, même avec l'actuel système de décote, elles continuent de gagner beaucoup d'argent en spéculant sur les dettes. Elles utilisent l'euro qu'elles maintiennent à un haut niveau alors que les capacités de production et d'emploi sont affaiblies, réduites, détruites.

L'argent issu du travail des salariés va servir à augmenter les moyens du fonds financier européen et à recapitaliser les banques. La note sera payée par des hausses de TVA d'ores et déjà annoncées, une pression accrue sur les salaires, des dégradations de services publics notamment dans l'Education Nationale, la Santé et la Sécurité, une mise à mal de la sécurité sociale, un recul supplémentaire de l'âge de départ à la retraite. A l'inverse, aucun acte concret n'est décidé pour mettre en place la taxe sur les transactions financières. Aucune décision n'est prise pour la relance de l'investissement productif. Pourtant la solution existe ! Elle consiste à transformer le fonds financier européen en un fonds de développement social, écologique et humain. De l'abonder grâce à un rôle nouveau de la Banque centrale européenne et à son pouvoir de création monétaire, tout en imaginant un nouveau système de crédit public pour le travail, les investissements utiles, le progrès social, culturel et écologique. Il n'y a d'ailleurs plus de solution viable sans nationalisation démocratique des grandes banques et des institutions financières pour relancer un crédit public contre la spéculation financière.

Derrière le vocable de « gouvernance économique » se profile une modification de l'idée même de communauté européenne telle que nous l'avons connue, en un système autoritaire, centralisé, impérial qui va donner, pour le compte de la haute finance, des pouvoirs nouveaux à la Commission de Bruxelles et à la BCE. Non seulement ils veulent contrôler et surveiller les budgets des Etats, mais ils veulent aussi s'octroyer le pouvoir de les modifier autoritairement en cours d'exercice par delà les parlements et les gouvernements nationaux. C'est ce qu'ils visent avec la modification des traités, mettre fin au droit de souveraineté populaire et au droit de souveraineté nationale. Le Traité de Lisbonne ainsi aggravé sera un verrou contre tout projet européen progressiste. Une véritable gangue qui aggrave la crise économique et sociale, en amorçant désormais une crise politique grosse de dangers pour les peuples et l'idée même de construction européenne.

Pour la sauver il faut en changer radicalement le cours. Cela passe par une mobilisation des peuples affirmant haut et fort leur solidarité, leurs ambitions de mises en commun face à l'égoïsme destructeur de la finance. Y contribuer est une responsabilité essentielle de toute la gauche, sous peine de pousser les peuples dans le désespoir.

Edito de l'Humanité 28 octobre 2011


Patrick Le Hyaric est Vice-président du groupe de la Gauche Unitaire Européenne /Gauche Verte Nordique au Parlement européen et Directeur de L'Humanité

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