par Partick Martin-Genier, le lundi 20 décembre 2010

La vie des institutions évolue au rythme de leur transformation. Depuis la montée en puissance du Conseil européen des chefs d'Etat et de gouvernement, tous les regards se tournent désormais vers cette institution présidée par le Belge Herman van Rompuy.



Une logistique impressionnante

A la veille du conseil européen des 16 et 17 décembre, l'immense hall d'entrée du bâtiment du Conseil haut d'environ une dizaine de mètres, avait été transformé en vaste salle de presse pouvant accueillir au moins deux cents journalistes venus du monde entier tant les enjeux sont importants.

Un semi-remorque avait même investi les lieux pour y débarquer tout le matériel et l'écran géant était monté module par module pour permettre aux responsables politiques de s'adresser directement à la salle de presse.

Le Berlaymont, siège de la commission européenne, placé juste en face, faisait un peu pâle figure, malgré sa rénovation intervenue ces dernières années pour cause de désamiantage, un peu à l'image de son président aujourd'hui affaibli par le rééquilibrage des institutions.


Mais pour quel contenu ?


Mais pour quoi cette foule de journalistes se pressai-elle à ce sommet ?

En réalité, la seule initiative contrainte de ce sommet aura été la décision de pérenniser le système d'aide financière aux Etats en difficulté, tels que la Grèce, l'Irlande ou bien encore d'autres pays.

Le fonds européen de stabilisation doté aujourd'hui de 450 milliards d'euros, et dont la capacité d'intervention peut être poussée jusqu'à 750 milliards d'euros grâce au FMI, sera donc inscrit dans le traité européen. Pour ne pas subir les affres du traité de Lisbonne, la voie parlementaire sera la seule utilisée pour ratifier cet amendement au traité.

Le côté intéressant de l'affaire est que la chancelière allemande a été contrainte d'aller dans ce sens en raison de la crainte de voir la Cour constitutionnelle de Karlsruhe interdire au parlement allemand de voter l'autorisation de venir en aide aux pays en difficulté. Ce n'est donc pas un geste gratuit et désintéressé vis-à-vis de ces pays….


Une plus grande intégration nécessaire


Car Angela Merkel ne s'est pas vraiment inscrite de gaîté de cœur dans ce système de sauvetage européen.La meilleure preuve en est qu'elle a catégoriquement refusé d'accepter l'idée de créer des « euro-obligations » permettant de mutualiser l'aide financière octroyée aux Etats, alors que d'aucuns ont estimé, notamment la Belgique, l'Italie et bien sûr le Luxembourg, qu'il s'agissait a priori d'une bonne idée.

L'Allemagne qui semble en effet faire cavalier seul, a ainsi convaincu très rapidement la France de ne pas aller plus loin…La France aura bien sûr négocié un retour d'ascenseur pour de prochaines négociations plus délicates, sans même vraiment chercher et ce qui est dommage, à savoir si l'idée de créer de telles « euro-obligations » n'allait pas dans le bon sens.

En tout état de cause, il est évident que l'approche commune des crises nécessitera dans un proche avenir une plus grande intégration et-osons le mot- un plus grand fédéralisme économique et financier !

Voilà le paradoxe : les chefs d'Etat sont parfaitement conscients qu'il faut aller vers plus d'intégration, soit une réduction des souverainetés, mais n'osent pas le dire franchement aux peuples de peur de se voir taxer d'irresponsables tentés de sacrifier la souveraineté nationale sur l'autel d'une Europe fédérale…

Il faudra bien un jour avoir le courage de ses opinions !


Patrick Martin-Genier est Maître de conférences à l'Institut d'études politiques de Paris, spécialiste des  questions européennes.

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