par Marianne Ranke-Cormier, le lundi 02 mars 2009

On s'est ému dans les milieux franco-allemands et européistes du double discours de la Chancelière allemande et du Président français. Le renouveau tant attendu d'un exercice que l'on croyait enfoui dans nos pages d'histoire. Mais ce ne sont certainement pas eux qui vont en écrire une nouvelle dans nos relations bilatérales et je les trouve plutôt inquiétants pour l'avenir de l'Europe.


Bilatéralisme, à l'heure de l'Europe et de la crise financière et économique globale, et qui se passe de frontières surtout dans les milieux financiers et bancaires, l'exercice en soi est déjà restreint. Jusque dans la mesure d'accueillir des troupes allemandes sur le sol français, mesure qui fait certes plaisir à tous ceux qui sont encore à ruminer sur la construction européenne, espace de paix, donc dépassés par l'Europe à la recherche d'asseoir son espace politique. On aurait pu s'attendre à ce que ces deux leaders, qui entendent si bien vouloir mener l'Europe, un terrain sur lequel le Président Sarkozy se délecte, au moins il n'a pas à se confronter à des citoyens récalcitrants- on se serait attendu à ce qu'ils mettent en commun autre chose que des soldats. Cela aurait pu être le lancement d'une réflexion approfondie pour une véritable défense européenne, ou la formation d'unités européennes. Non au lieu de cela, au lieu de l'Europe, voilà qu'on nous vante et vend l'Otan, car c'est là que nous pourrons assurer ce que Merkel et Sarkozy appellent la mission commune de l'Europe: notre sécurité!

Alignement, car après nous avoir fait croire que tous les européens étaient plus américanistes que les américains le passage en force de l'Obama-mania n'a pas vraiment eu lieu. Il était plutôt mitigé l'accueil réservé au discours d'Obama sur les responsabilités de l'Europe et la nécessité que les Européens s'engagent désormais dans les conflits internationaux, comme en Irak, Afghanistan, Moyen Orient, pour soutenir la "nouvelle" politique internationale américaine -dans le style, maintenant que les Etats-Unis s'enfoncent non seulement dans les conflits mais aussi dans la récession et le marasme économique nous vous demandons de la solidarité, merci de payer les pots cassés, car après tout ce n'est pas de notre faute si pendant huit ans nous avons été gouvernés par Bush... Une condamnation de Bush et de ses politiques? On pourra attendre longtemps, mais Obama aura beau vouloir faire semblant ces huit dernières années laisseront encore longtemps des plaies béantes à la surface du monde.... Et contrairement à ce que Merkel et Sarkozy veulent faire croire, en agitant devant nous toutes les menaces du terrorisme (eh oui ils en sont encore là!), les européens ne sont pas subitement devenus plus militaristes, les français et les allemands non plus. Mais en période de crise la vente d'armes peut se révéler fructueuse économiquement. Le Président français parcourt le monde pour vendre son nucléaire, Obama et Merkel vendent l'Otan à leurs amis, et leurs armes avec bien sûr. Et demain ce sera tout le leadership européen qui réclamera la mise en place des bases américaines anti-missiles... Plus qu'un pas à franchir...

On savait déjà que Sarkozy rêve d'un siège à l'Otan. Voilà donc un joli exercice bien déguisé pour faire passer la pilule aux gaullistes français! Ce n'est pas lui, c'est l'Europe qui veut çà... Mais le monde lui n'attend pas l'Otan!

Paru le 19 février 2009 dans Newropeans Magazine


Marianne Ranke-Cormier est membre du comité de rédaction de Newropeans Magazine

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