par Xavier Grosclaude, le vendredi 26 juin 2009

Les résultats du sondage intitulé "Quelle Europe ? Les français et la construction européenne" et commandé par la Représentation de la Commission Européenne en France sont intéressants car ils confirment des tendances déjà observées il y a trois ans.
Les résultats et commentaires de ce sondage réalisé par The Gallup Organization sont consultables sur le site :

http://ec.europa.eu/france/news/eurobarometre-mai2009_fr.htm


I - La relation européenne des français au monde, une relation en voie de consolidation.

Principale enseignement du sondage réalisé par Gallup, la perception générale de la construction européenne par les français est stable avec moins de 15 % de nos concitoyens opposés au principe même de la construction européenne.

Autre constante, comme en 2006, près de deux tiers des Français estiment que les pays de l'Union européenne possèdent des valeurs communes qui les distinguent du reste du monde: 17% des Français se déclarent tout à fait d'accord avec cette appréciation et près de la moitié (46%) se disent plutôt d'accord.

Par ailleurs, interrogés sur ce qui définit le mieux l'identité européenne parmi une liste de sujets, plus de la moitié des Français citent la démocratie et le respect des droits de l'homme (57%), la géographie (56%) et/ou une économie de marché (55%). A noter que l'existence d'une histoire commune est également mentionnée par près de quatre Français sur dix (38%).

Enfin, résultat réconfortant, six Français sur dix affirment se sentir à la fois français et européen, une proportion parfaitement identique à celle enregistrée en 2006, tandis qu'environ trois Français sur dix (31%) disent se sentir français mais pas vraiment européen.

D'un point de vue politique, plus de trois-quarts des Français (78%, trois points de plus qu'en 2006) jugent que la construction européenne les rend plus forts face au reste du monde et environ un tiers des Français en sont convaincus (34% de tout à fait d'accord).

La majorité des Français (54%) considèrent également que face à la crise financière et économique, les institutions européennes ont bien joué leur rôle, 36% étant d'un avis contraire. Cependant, seuls 3% des personnes interrogées jugent que les institutions ont très bien joué ce rôle. Un Français sur dix ne se prononce pas sur cette question.


II - La relation dégradée des français à l'égard de l'information et des institutions européennes.


Inquiétant mais pas tout à fait surprenant…, plus de deux-tiers des Français disent ne pas se sentir bien informés sur le fonctionnement de l'Union européenne (69%, + 6 points par rapport à l'enquête de 2006, effectuée quelques mois après le référendum sur le projet de traité constitutionnel). Aujourd'hui, seuls 7% des Français sont tout à fait d'accord pour dire qu'ils se sentent bien informés (-3 points).

D'une manière générale, plus de sept Français sur dix estiment que la construction européenne est trop éloignée des préoccupations des citoyens (72%), ce qui marque tout de même un recul de dix points par rapport au sondage réalisé en 2006). Ils sont cependant majoritairement plutôt d'accord (44%) que tout à fait d'accord (28%) avec cette appréciation.

A qui la faute ? Aux hommes politiques, aux médias ? Selon le sondage, environ trois-quarts des Français estiment que les hommes politiques français devraient leur parler davantage de l'Union européenne (76%, -11 points par rapport à 2006) et plus d'un tiers des Français sont tout à fait d'accord avec cette suggestion (36%, -8).

D'autre part, sept Français sur dix estiment de manière similaire que les médias devraient davantage leur parler de l'Union européenne (71%, -9) et là encore, environ un tiers des Français sont tout à fait d'accord avec cette suggestion (32%, -6).


III - La relation duale des français aux ambitions de l'Union Européenne.


Pour une majorité de Français (55%), l'Union européenne devrait être à la fois un projet politique et un marché économique. Cette proportion est en progression de dix points par rapport à 2006. Un quart des Français estiment qu'il devrait s'agir avant tout d'un marché économique (+3 points), 9% d'un projet politique (-4), tandis que la réponse ni l'un, ni l'autre est choisie par 9% des personnes interrogées (-9).

Dans le même temps, les Français sont partagés sur les orientations possibles pour l'avenir de la construction européenne: intégration ou coopération. Tandis que 44% des Français se disent favorable à une Europe des Etats dans laquelle chaque pays peut décider au coup par coup de coopérer ou non avec les autres, 47% se prononcent pour une intégration renforcée, qu'il s'agisse d'une évolution vers un gouvernement européen supranational (14%) ou de l'idée d' aller plus loin dans l'intégration européenne, tout en respectant le rôle des Etats.

Enfin, les Français restent partagés sur la question de savoir si l'élargissement de l'Union européenne avec douze nouveaux Etats depuis 2004 a été une bonne chose: la moitié des répondants se disent plutôt (35%) ou tout à fait d'accord (15%) avec cette évaluation tandis que 45% expriment un scepticisme plus ou moins marqué. Toutefois, la perception positive des récents élargissements a très légèrement progressé par rapport à 2006 (47% jugeaient alors que l'élargissement à dix nouveaux Etats en 2004 avait été une bonne chose, 49% choisissant une réponse négative).


IV - La relation sélective des français à la géographie…


Les Français sont également partagés dans leur conception de l'élargissement et des frontières de l'Union européenne: plus de la moitié des Français (53%, trois points de plus qu'en 2006) considèrent qu'on ne peut pas définir les frontières de l'Union car elle a vocation à s'étendre à tout pays européen souhaitant y adhérer et partageant ses valeurs. Cependant, 40% des répondants (-7) sont d'avis qu'avant tout nouvel élargissement, il est nécessaire de se mettre d'accord sur les frontières définitives de l'Union européenne.

Concrètement, près de la moitié des Français disent souhaiter que la Croatie adhère à l'Union européenne dans la décennie à venir, soit le plus vite possible (18%), soit dans quelques années (28%). Seul un Français sur dix est opposé à ce que la Croatie adhère à l'Union européenne et deux Français sur dix ne se prononcent pas, ce qui révèle une parfaite stabilité de l'opinion par rapport à l'Eurobaromètre Flash réalisé en 2006.

Les Français sont légèrement moins favorables à une adhésion rapide de l'Ancienne République yougoslave de Macédoine à l'Union européenne qu'ils ne le sont dans le cas de la Croatie: 13% seulement sont partisans d'une adhésion le plus vite possible et un quart des Français disent souhaiter une adhésion dans quelques années. Comme dans le cas de la Croatie, deux Français sur dix ne se prononcent pas.

S'agissant de la Turquie, plus d'un tiers des Français disent souhaiter que la Turquie n'adhère jamais à l'Union européenne (37%, - 1 point depuis 2006). Seul environ un quart des répondants disent désirer une adhésion dans un avenir relativement proche, qu'elle se fasse le plus vite possible (7%, +3) ou dans quelques années (21%, +5).

Alors que de nombreuses enquêtes proposant un questionnement binaire (pour ou contre l'adhésion) aboutissent à des résultats négatifs, une question plus nuancée telle que celle-ci permet de constater que si l'opposition à une adhésion rapprochée est clairement majoritaire, 53% des Français (-6 points par rapport à 2006) se prononcent tout de même pour une adhésion de la Turquie à plus ou moins long terme (qu'elle soit souhaitée le plus vite possible ou dans un horizon dépassant une quinzaine d'années).

La part des indécis, à 11%, progresse de sept points en trois ans. On peut également noter que les plus jeunes sont les plus enclins à privilégier les réponses le plus vite possible, dans quelques années ou dans 10 à 15 ans: 49% des 15-24 ans choisissent une de ces trois catégories de réponse (contre 35% dans l'ensemble de la population).




Xavier Grosclaude est diplômé en sciences politiques et en droit communautaire. Membre de plusieurs think tanks français, il combine une double expérience des affaires européennes en France et au Royaume-Uni.  

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