par Ad van Tiggelen, le vendredi 04 septembre 2009

Les marchés financiers sont entrés dans une nouvelle phase. Les gains de ces derniers mois sont principalement le fruit des anticipations des investisseurs, lesquels avaient misé sur la fin de la récession et de la crise du crédit. Maintenant que les valorisations se sont normalisées, la principale préoccupation ne concerne plus le timing de la reprise, mais bien son ampleur.


Les investisseurs ne parviennent pas à s'accorder sur ce sujet.

Certaines des grandes maisons de courtage américaines estiment que la croissance économique va rapidement retrouver les sommets avec lesquels elle flirtait avant 2008.

D'autres, dont nous faisons partie, estiment qu'une récession anormalement sévère ne peut déboucher sur une reprise normale et qu'il faut plutôt s'attendre à une croissance plus modeste, inférieure à son potentiel.

Les divergences entre les investisseurs se traduisent, dans une certaine mesure, sur les marchés financiers, avec des valeurs cycliques qui crèvent les plafonds et, parallèlement, les taux des emprunts d'Etat à long terme qui ne cessent de baisser.

Cela ne pourra pas durer. En effet, des taux à long terme bas sont typiquement le signe d'un monde avec très peu ou pas d'inflation. Or un tel environnement a tendance à peser sur le pouvoir de fixation des prix ("pricing power") et la croissance des revenus des sociétés cycliques.

Le débat entre les investisseurs se focalise sur le rôle du consommateur et sur l'impact de la faiblesse des taux directeurs. Comme Bernanke l'a confirmé, il est probable que les taux officiels vont rester bas pendant quelque temps
encore. Ce sera tout bénéfice pour les actifs à risque, puisque les investisseurs ne gagnent pas beaucoup en laissant leur argent en banque. Voilà une des raisons pour lesquelles les marchés financiers ont réagi de manière si euphorique après la publication de chiffres supérieurs aux attentes.

Toutefois, pour que cette reprise soit forte et durable, l'investisseur aura besoin du consommateur. Après tout, la consommation représente tout de même 60% à 70% du PIB dans le monde industrialisé. Or, nous ne croyons pas en une
reprise “normale” de la consommation, après une récession anormalement sévère. Pourquoi ?

- Les consommateurs demeurent plus endettés que jamais, surtout dans le monde anglo-saxon.

- Les consommateurs sont habitués à des taux d'intérêt bas depuis pratiquement dix ans. Ces taux n'auront donc pas autant d'effet sur les dépenses qu'auparavant.

- Les consommateurs prennent de l'âge dans les pays industrialisés. Les Etats-Unis et l'Europe entrent dans une période délicate sur le plan démographique. Les consommateurs plus âgés ont tendance à acheter moins de biens (immobiliers), comme on a pu le constater au Japon. Cela est en partie compensé par la croissance de la consommation dans les pays émergents, mais ceux-ci ne représentent encore que 25% à 30% de la consommation mondiale.

- Les salaires réels des consommateurs occidentaux vont probablement croître à un rythme très faible en 2010 et 2011. Le contrôle des coûts restera une des principales priorités des dirigeants d'entreprises.

- Parallèlement, les consommateurs devront faire face à une hausse permanente des prix des matières premières, sous la pression de la demande dans les marchés émergents.

Il est donc très probable que la consommation connaîtra une reprise particulièrement lente et modeste après cette récession.Cela se traduit dans nos portefeuilles par une sous-pondérationdes secteurs liés à la consommation (distribution, automobile, produits domestiques, produits alimentaires et boissons) et unesurpondération des services (télécommunications, services aux
collectivités), de l'énergie et des technologies.

Sur le plan géographique, nous préférons l'Europe aux Etats-Unis. Les
valeurs européennes sont clairement moins chères, elles affichent des rendements du dividende plus élevés et elles sontmoins présentes dans les secteurs liés à la consommation.


Ad van Tiggelen est Stratégiste Senior, ING Investment Management

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