par Monica Frassoni, le vendredi 25 juillet 2008

Fédéraliste convaincue et depuis toujours, championne du "rêve européen", Monica Frassoni se dit "très préoccupée" par le NON irlandais. Un vote négatif qui est plus lié à un manque de clarté qu'à une aversion des citoyens à l'égard de l'Europe, mais qui ouvre une période difficile dans le processus d'intégration de notre continent, avec également des conséquences sur le fonctionnement de l'Union et sur le processus d'élargissement.

Elle est interrogée par Enrico Mayrofer pour le compte de la newsletter de juillet de "La voix des régions prériphériques maritimes" (http://crpm.org


EM : Madame la députée, les institutions de Bruxelles entament une prise de conscience après le NON irlandais. Que pensez-vous faire à présent?


MF : Le Conseil européen a décidé de continuer le processus de ratification dans tous les autres pays et d'attendre l'automne pour évaluer une éventuelle proposition irlandaise. Le Parlement a accepté cette stratégie d'attente, mais à condition qu'il ne s'agisse pas d'une attente passive et déresponsabilisante. Il faut faire comprendre aux citoyens combien l'Union européenne est importante, surtout au vu des élections de l'année prochaine. Personnellement, je suis d'accord avec les positions du Parlement et du Conseil, même si je voudrais que le Parlement soit le lieu central où alimenter ce débat public. En outre, je relance l'idée d'une Europe à plusieurs vitesses : s'il est bien vrai qu'on ne peut pas obliger les irlandais à ratifier le Traité de Lisbonne, et donc à ne pas poursuivre dans la voie de l'intégration européenne, il est tout aussi vrai que tous les autres ne peuvent pas être obligés de s'arrêter.


EM : On a beaucoup rejeté la faute sur l'Irlande, pays qui a beaucoup bénéficié de l'Europe, mais ne croyez-vous pas que l'Union européenne ait une part de responsabilité ? Avez-vous fait un examen de conscience au Parlement ?


Depuis le NON français et néerlandais, j'ai toujours dénoncé l'attitude passive du Parlement. On a voulu s'en contenter. Le Parlement s'est toujours aligné sur les gouvernements laissant ainsi les négociations sur le Traité de Lisbonne se dérouler au sein de la Conférence Inter-Gouvernementale (CIG), selon une méthode vieille, non compréhensible et secrète. Après, il ne faut pas être surpris du résultat : un texte sans ambition qui se résume à une compilation d'articles compliqués et peu clairs. Malheureusement, le Parlement européen a contribué à transformer un grand projet ambitieux en quelque chose de gris et obscur !


EM : Madame la députée, verra-t-on un jour une Europe fédérale ?


Comme le disait Altiero Spinelli, l'Europe ne tombera pas du ciel, et je crains que, sans une mobilisation forte des politiques et des citoyens, cette Europe que nous voulons toutes et tous ne voit pas le jour, mais restera pour toujours enlisée dans des querelles diplomatiques incompréhensibles pour les citoyens. De plus, cette opacité du projet européen renforce toujours plus les peurs des citoyens et fait le lit des campagnes du NON basées sur le mensonge. Par exemple, dans cette dernière campagne électorale, on est arrivé à l'absurde, comme quoi l'Irlande perdrait sa neutralité le jour suivant l'entrée en vigueur du Traité, ou encore le droit à dire non à l'avortement !

Je pense que pour retrouver les motifs de l'Europe fédérale il faut surtout mobiliser et informer les gens sans dire de mensonges.


Enrico Mayrhofer
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La voix des régions périphériques maritimes

http://crpm.org


Monica Frassoni est députée européenne depuis 1999 et aujourd'hui, elle est co-présidente avec Daniel Cohn Bendit du groupe des Verts au Parlement européen.

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