La commission affaires européennes Sénat et de l'Assemblée nationale et parlementaires européens se réunissaient au Palais du Luxembourg mercredi 22 février sous la présidence commune de Simon Sutour et Pierre Lequiller.
Le député des Yvelines a introduit les débats en se félicitant de l'adoption du traité sur la stabilité, la solidarité manifestée à l'égard de la Grèce, enfin l'institutionnalisation des sommets de la zone euro tout en relevant que les défis étaient désormais devant nous.
En guise de parlementaires européens, n'étaient présents qu'une poignée d'entre eux, notamment Pervenche Bérès pour le parti socialiste, François Grossetête, Jean-Paul Gauzès et Alain Lamassoure pour l'UMP, enfin
Bruno Gollnisch pour le Front national.
Une mise au point de Mme Bérès
Mme Bérès était venue pour présenter deux projets de règlement du parlement européen et du conseil relatifs au renforcement de la surveillance économique et budgétaire d'une part et, d'autre part, prévoyant des dispositions communes pour l'évaluation des projets de plans budgétaires.
Signe des temps, la députée européenne a tout d'abord tenu à préciser un certain nombre de points pour corriger la présentation faite par Pierre Lequiller "qui est la sienne" des progrès enregistrés sur beaucoup de points et a affirmé qu'elle ne partageait pas son optimisme. Pour elle, le traité ne résout pas fondamentalement les problèmes de la zone euro.
Mme Bérès a aussi tenu à dire que le parlement européen avait déjà organisé des réunions communes avec les parlements nationaux depuis longtemps pour parler des questions économiques et budgétaires.
Rendons à César ce qui est à César a-t-elle asséné se voyant répondre par Pierre Lequiller et à Césarine ce qui est à Césarine
La députée européenne a tenu aussi à mettre en garde contre la confusion des genres : l'idée d'une grande conférence recréerait ce qu'était le parlement européen avant son élection au suffrage universel direct, avec des parlementaires nationaux s'occupant, au coté des parlementaires européens des questions financiers et budgétaires.
Pour Pervenche Bérès, chacun doit rester dans ses champs de compétence et il faut éviter le mélange des genres qui peut créer des confusions en ce qui concerne le contrôle démocratique.
Pervenche Bérès a donc fait me point sur le projet de règlement élaboré à l'initiative d'Elisa Ferreira, députée socialiste portugaise en ce qui concerne les projet de réglementations budgétaires et correction des déficits excessifs dans zone euro en rapport avec l'article article 136 du traité. Chaque projet budgétaire national serait ainsi soumis à la commission qui l'examinerait au regard des exigences du pacte de stabilité.
Cela suppose une harmonisation des calendriers budgétaires nationaux. Si ces dispositions s'appliquaient aujourd'hui, 14 des 17 états membres de la zone euro seraient concernés ! C'est dire l'état des finances publiques de la majorité des pays de cette zone censée faire oeuvre de vertu budgétaire
Enfin, des recommandations seraient adressées aux parlements par la commission européenne.
Pour Pervenche Bérès,le projet d'Elisa Ferreira apporte un certain nombre de «correction» en ce qui concerne les éléments structurants du semestre européen."
La question du contrôle démocratique
Il faudra aussi penser à l'instauration d'autorités crédibles et indépendantes pour surveiller le processus en lien avec l'intégration de la règle d'or dans les constitutions des Etats membres.
Pour Jean-Paul Gauzès, député européen UMP, il faut exclure la règle d'or du règlement. M. Gauzès s'est étonné que dans le cadre de la décision de la commission de mettre un Etat sous surveillance (article 2 du projet de règlement), il n'existe pas de règle de majorité spécifique et qu'il n'était même pas prévu que le conseil ait son mot à dire, ce qui semblen'avoir inquiété personne. Pour le parlementaire européen, il serait judicieux de mettre en place une protection juridique de l'État en difficulté qui pourrait se comparer à celui du régime des entreprises en difficulté
Ces projets de règlements posent aussi le problème du fonctionnement démocratique de l'État concerné ; selon lui on ne peut pas laisser le pays sous la pression des agences et des banques
Pour M. Lamassoure député européen UMP, qui considère qu'avec ce qui vient de se passer, les pays sont désormais garantis pendant vingt ans de la tentation du surendettement, "tout est à inventer" : il n'existe pas de tableau comptable ou d'instruments permettant de savoir où on en est.
Pour l'ancien ministre, il s'agit de mettre en place une sorte de «concert économique européen" où chacun aura sa partition à jouer.
Cependant, resterait le problème politique : les pays du nord, censés être plus vertueux et donc moins endettés, devraient accepter de faire des politiques de relance : mais s'ils ne sont pas d'accord ?
Le club des pingres, dont les pingres de Berlin
Le président de la commission des budgets du parlement européen n'y est pas allé par quatre chemins : il existe en Europe un "club des pingres", dont les pingres de Berlin qui ne veulent pas augmenter le budget européen mais accepte d'accorder sans hésiter 130 milliards d'euros à la Grèce !
Pour le sénateur Pierre-Bernard Raymond, il est nécessaire de faire une relance au niveau européen plutôt que dans chaque Etat et il faut faire comprendre aux États qu'ils ne peuvent transférer leur réflexe au niveau européen où il n'y a aucun endettement ! Il en conclut qu'il faut doubler le budget européen.
Christophe Caresche député PS de Paris a quant à lui critiqué le chevauchement de textes qui crée une vraie concurrence entre les institutions, ce qui, selon Pervenche Bérès, constitue une élément très grave : nous devons alerter l'exécutif qui est brouillon dans ses initiatives a-t-elle averti.
Pierre Lequiller s'est cependant voulu résolument optimiste : il a noté les progrès considérables qui ont été réalisés sur le thème de la gouvernance terme qu'il ne fallait même pas employer au Bundestag il y a de cela qu'un an environ
Au final, cette réunion conjointe a permis de débattre d'un sujet très important à la veille d'échéances essentielles pour l'avenir du pays et on ne peut que se réjouir de ce débat constructif.
Patrick Martin-Genier est Vice-Président de Fenêtre sur l'Europe, Maître de conférence à l'Institut d'études politiques de Paris