par Philippe Herzog, le vendredi 02 septembre 2011

Après l'enflure des valeurs boursières du passé et les excès de l'endettement, une dévalorisation du capital est normale. Mais la violence de la chute de cet été n'était pas fatale. Elle est liée à l'interruption de la reprise économique des deux côtés de l'Atlantique ; et elle marque une défiance générale des investisseurs envers les politiques. Bien qu'exagérée par la spéculation, cette défiance n'est pas irrationnelle : si pour l'instant les tensions sur la liquidité bancaire ne sont pas comparables à celles
de 2008, et si les Banques centrales font leur travail, la menace d'une nouvelle récession n'est pas du tout négligeable.


Les politiques économiques en Europe empruntent deux voies, toutes deux justifiées : l'assainissement des finances publiques et la coordination entre les Etats.

Mais l'assainissement a des effets récessifs s'il n'est pas accompagné d'une relance des investissements : la doctrine selon laquelle le secteur privé prendra le relai est fausse, jamais son aversion au risque n'a été plus grande. Quant à la coordination entre Etats, malgré des efforts historiques(en regard de la quasi absence antérieure), elle n'est pas encore à la mesure du défi.

La Facilité Européenne de Stabilité Financière a permis de gagner du temps, mais en ajoutant de la dette à la dette. Le Sommet du 21 juillet a marqué un réel progrès : le poids de la dette grecque est jugé insupportable, on décide de la réduire en mutualisant une partie et en faisant accepter un défaut partiel aux investisseurs. Mais ces décisions ne sont pas encore ratifiées et la dotation de la FESF est trop faible quand plusieurs autres pays sont à soutenir.

Plus généralement, une restructuration organisée des dettes publiques (et bancaires) est nécessaire. Il faut aller vers la création d'eurobonds, c'est-à-dire substituer une dette communautaire à une partie des dettes nationales. Mais ce n'est pas un remèdemiracle! Il n'exempte pas de cette restructuration, laquelle a un coût : un transfert important des créanciers en faveur des débiteurs.

Les eurobonds devront être garantis par les Etats, Allemagne en tête, qui est fondée à exiger des conditions. Ainsi pour W. Schaüble, il faudrait é unifier" les politiques budgétaires nationales, avec un contrôle mutuel fort. C'est s'obliger à discipliner la "souveraineté" nationale et avancer vers l'Union politique.

Quand J.-C. Trichet appelle à créer un Ministère européen desFinances, il propose d'institutionnaliser ce "fédéralisme " budgétaire.

Il faut faire mûrir, négocier, et aboutir ces options novatrices, mais bien comprendre aussi qu'elles ne règleront nullement un sous-jacent fondamental de la crise de l'eurozone : les divergences de compétitivité entre ses membres. Pas plus qu'elles ne règleront le biais des politiques économiques actuelles : un assainissement sans relance de l'investissement à long terme, moteur sine qua non d'une nouvelle croissance.

Un sujet auquel la Revue de Confrontations Europe vient de consacrer un dossier remarqué, et qui sera au coeur des Entretiens Economiques Européens de novembre à Paris 1.

Le Pacte euro plus, que devrait impulser le "gouvernement économique" de l'eurozone proposé en août, la rénovation du grand marché et la réforme du Budget sont de premiers efforts pour converger vers une nouvelle croissance. Leur faiblesse n'incombe pas seulement aux dirigeants, elle traduit les divergences et les incohérences des sociétés.

Il faudra un réel progrès des consciences et de l'exercice de démocratie pour les surmonter. Je propose de mettre dans le débat public quelques orientations fortes pour un programme politique, que vous trouverez ci-contre. (ndlr il sera publié par Fenêtre sur l'Europe dans quelque jours)

1 Cf. Confrontations Europe, la Revue n° 95, juil-sept. 2011 ; et voir le programme des EEE en colonne 4

Par dans Interfaces n°69 de Confrontations Europe
http://www.confrontations.org


Philippe Herzog est Président fondateur de Confrontations Europe

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