La dure réalité économico-financière
La crise profonde que traverse la Grèce en ce moment vient nous rappeler sévèrement à la réalité ; une réalité économique, budgétaire et financière qui pourrait se résumer en quelques mots simples : un pays ne peut vivre constamment au-dessus de ses moyens.
Cette règle est d'autant plus vraie que l'Union européenne a également été frappée par la crise économique et financière. Le budget d'un Etat n'est pas extensible. Il n'est pas possible de le gérer "à la petite semaine" en augmentant constamment les dépenses sans vision à moyen et long terme et, par suite, l'endettement du pays.
L'endettement peut constituer une source pertinente de richesses à partir du moment où le remboursement de cette dette ne pose pas de problèmes particuliers.
Mais lorsqu'un pays est surendetté, et que les banquiers ne sont plus certains que le pays sera capable de faire face à l'exigibilité de cette dette, alors les choses peuvent s'emballer très rapidement. En outre reporter en permanence le remboursement d'une lourde dette sur les générations futures au-delà d'un seuil tolérable, témoigne d'une rare irresponsabilité, aussi incompréhensible qu'intolérable.
La gestion des finances publiques en question
Il est donc urgent de réduire le train de vie de l'Etat. Il est vrai, sans vouloir stigmatiser un pays plus qu'un autre, que plus on descend vers le sud, plus la gestion des deniers publics pose problème
Les pays nordiques font preuve d'une réelle exigence dans la gestion de l'argent public. On ne dilapide pas l'argent du contribuable
Le moindre travers conduit en effet à la démission immédiate du contrevenant
Dans les pays du Sud, il est un fait avéré que la gestion des finances publiques est plus "lâche". Le précédent gouvernement grec avait ainsi caché la réalité de l'état des finances publiques de la Grèce, ce qui, dans une entreprise, aurait conduit directement ses dirigeants légaux en prison. Sur ce point, la responsabilité des dirigeants politiques, notamment celle de l'ancien Premier ministre grec Caramanlis, est réelle
Les Européens n'ont pas le choix : la solidarité s'impose
Le réveil va donc être brutal, car il va être synonyme d'austérité imposée, que celle-ci vienne de la commission européenne, voire du Fonds monétaire international comme l'a laissé entendre le Premier ministre grec M. Papandréou.
Devant une telle situation, les Européens n'ont pas le choix : ils doivent faire preuve d'une solidarité sans faille et ce pour différentes raisons.
D'une part, laisser seule la Grèce face à ses difficultés pourrait faire sombrer l'Europe entière dans une crise de confiance que ne manqueraient pas d'exploiter les acteurs financiers mondiaux et probablement même sans l'avoir voulu les autres grandes puissances économiques mondiales, dont les Etats-Unis à travers ses grandes entreprises et ses lobbys extrêmement protectionnistes, aptes à exploiter la moindre brèche de ses "partenaires" commerciaux.
D'autre part, un euro faible pourrait certes contribuer à renforce les exportations, mais une faiblesse durable due à l'incapacité des Européens à faire face à ses difficultés internes pourrait conduire à une implosion de la zone euro dont l'Europe ne se relèverait pas.
Mais le peuple grec va souffrir, notamment les classes les plus défavorisées qui vont devoir faire face à des augmentations d'impôts qui vont plomber le pouvoir d'achat pendant longtemps.
L'exemple grec devrait faire réfléchir les autres pays de l'Union européenne qui, peu ou prou, pourraient se retrouver dans une situation sinon similaire, du moins s'en rapprochant. La France est-elle à l'abri ? Le Premier ministre François Fillon n'avait-il pas déclaré au début du quinquennat et au grand dam de Nicolas Sarkozy, qu'il était "à la tête d'un Etat en faillite"? Mais la France n'en est pas encore à passer sous les fourches caudines de la Commission européenne
Patrick Martin-Genier est maître de conférences à l'Institut d'études politiques de Paris, expert des affaires européennes