L'histoire de l'Union européenne est marquée par la fixation d'étapes et de grands rendez-vous qui jalonnent son processus d'intégration économique et politique . Ces étapes peuvent être des adhésions , des révisions des Traités , des réalisations concrètes (marché intérieur / UEM) , des échéances institutionnelles (renouvellement du Parlement et de la Commission) ou des programmes pluriannuels (prévisions financières , politiques communes) ...
Ces échéances , parfois , se cumulent soit par le hasard des calendriers soit par la volonté politique des Institutions et peuvent alors être l'occasion d'un grand "aggiornamiento" dans l'évolution générale de l'UE .
L'année 2014 s'annonce d'ores et déjà comme l'exemple frappant d'un de ces grands rendez vous que l'Union se fixe périodiquement à elle-même .
C'est en effet autour de cette date que se situent plusieurs échéances de grande importance :
- la 8ème élection du Parlement européen au suffrage universel direct (avec la perspective d'un nouveau mode de scrutin incluant notamment des listes transnationales) ;
- le renouvellement de la Commission (suite à la décision du Conseil européen de décembre 2008 , le collège devrait conserver un ressortissant de chaque Etat membre - mais cette décision doit encore être confirmée et insérée dans le Traité à l'occasion de la prochaine adhésion ) ;
- le renouvellement du Haut Représentant (en même temps que le collège de la Commission dont il est Vice-Président) ;
- le renouvellement du Président du Conseil européen (déjà renouvelable en 2012) ;
- l'entrée en vigueur de nouvelles modalités de vote au sein du Conseil (suppression de la pondération des voix et introduction de la double majorité des Etats et de la population - avec un "filet de sécurité" jusqu'en 2017) ;
- l'entrée en vigueur des nouvelles prévisions financières pluriannuelles pour la période 2014/2019 (avec une éventuelle modification du régime des ressources propres ) .
Ajoutons à cette liste (probablement incomplète ...) la perspective d'un éventuel élargissement "groupé" de tout ou partie des Etats des Balkans à la suite de l'adhésion de la Croatie dès 2012 (l'année 2014 sera en effet ...le centième anniversaire de l'attentat de Sarajevo !) .
Dès lors , il serait sans doute opportun de viser également cette date pour l'indispensable révision des Traités relative au pilier économique de l'Union économique et monétaire (voir les précédentes Brèves n° 300 et 303) .
La nature de cette révision sera simple : la crise actuelle - et les mesures provisoires d'urgence prises pour y faire face - ont clairement mis en évidence quelles sont les modifications de nature constitutionnelle nécessaires pour asseoir l'Union économique sur des bases juridiquement sûres et politiquement légitimes et démocratiques .
Le processus politique de révision sera bien sûr plus délicat que ce constat - même si l'expérience du Traité de Lisbonne a montré que les difficultés proviennent plus de la ratification que de la révision elle-même (voir Pour un nouveau traité d'Union économique (Maastricht II) (suite) ) .
à la révision des Traités devraient faciliter la mise en route et le bon déroulement du processus . Rappelons en effet qu'aux termes de cet article :
- le Parlement européen peut soumettre au Conseil un projet de révision ;
- le Conseil décide à la majorité qualifiée d'ouvrir la procédure de révision sur la base de ce projet ;
- le projet est débattu (publiquement) et modifié /adopté (par consensus) par une Convention des représentants des parlements nationaux et européen , du Parlement européen et des Chefs d'Etat et de Gouvernements ;
- le projet est arrêté d'un commun accord par une CIG .
On voit donc le rôle important que jouent dans cette procédure les parlementaires européens , lesquels ont constamment - avant même le début de la crise - invité la Commission et le Conseil à poser les bases constitutionnelles d'une Union économique comme indispensable soutien de l'Union monétaire .
Il reste à espérer que le projet de révision (dont le PE peut prendre l'initiative , rappelons-le ) soit mis en chantier à bref délai ne serait-ce que pour "profiter" de l'effet d'alarme causé par la crise . L'annonce de cette entreprise permettrait par ailleurs de renforcer la crédibilité des mesures d'urgence (dont le caractère novateur est indiscutable comme l'écrit justement l'éditorialiste d'Agence Europe de ce jour) aux yeux des opérateurs financiers privés et publics internationaux .
Encore une fois : "Never waste a good crisis or it will waste you" !
Jean-Guy GIRAUD est Président - UEF France