par Jean-Dominique Giuliani, le vendredi 05 juin 2009

C'est un événement politique continental qui retient naturellement l'attention.
On tirera des enseignements du pourcentage d'abstention, de la poussée ou non des extrêmes, de la confiance ou de la défiance manifestée, à cette occasion, aux gouvernements nationaux.


On sera attentif au poids du nouveau Parlement européen sur la conduite des affaires communautaires par la Commission.
Il faudra aussi s'interroger sur une réelle désaffection à l'égard des institutions et des politiques européennes, comme sur les dérives inquiétantes de la campagne électorale à l'endroit des Roms (Hongrie), des immigrés (Italie) et, plus généralement, de la construction communautaire (République tchèque, Royaume-Uni).

Pourtant ce mois de juin pourrait cacher un événement encore plus important: la courte visite de Barack Obama sur le territoire européen.
La distance qu'il a choisi de manifester envers Angela Merkel et Nicolas Sarkozy, refusant les réunions de travail comme les entretiens privés, est inquiétante.

L'une serait-elle punie pour avoir critiqué la politique de la Banque centrale américaine, l'autre pour avoir fait exister l'Europe dans la crise caucasienne?

Les deux seraient-ils boudés pour avoir imposé le G20, désormais incontournable, à une Amérique un temps désemparée avant de retrouver un leader aux qualités de communicateur global?

Les Etats-unis privilégient toujours une vision stratégique du monde auquel ils confrontent leurs intérêts propres.

Dans cette optique, la construction européenne n'a d'intérêt que si elle conforte le projet, entamé en 1945, de pacifier le continent, mais certainement pas d'y faciliter l'émergence d'un "centre de pouvoir".

C'est ainsi que Barack Obama accorde plus d'importance à la Reine d'Angleterre et à la Turquie qu'à l'achèvement de l'union politique de l'Europe!

L'Amérique manifeste une véritable réticence face à des régulations mondiales qui pourraient consacrer la multipolarité du monde et une nouvelle ère dans les relations internationales.

Unie politiquement, l'Union européenne, alliée des Etats-Unis, aurait son mot à dire sur tous les sujets en fonction de ses intérêts propres, qui peuvent désormais être mesurés à l'aune de sa force de 1ère puissance économique mondiale, de 1ère puissance commerciale, de 1er investisseur extérieur.

De surcroît son message pacifique, copié, envié, sollicité partout, interdirait que l'avenir du monde se résume à un tête-à-tête USA-Chine.

Pourtant l'intérêt commun des deux rives de l'Atlantique serait qu'émerge une Europe forte, c'est-à-dire une alliée forte.

L'administration américaine est-elle capable de faire ce pari?
Pour l'instant, B. Obama a préféré se rendre dans un camp de concentration et sur les plages de Normandie, comme un rappel du passé qui pèserait sur l'avenir!...

On mesure alors la responsabilité des Français et des Allemands. Eux seuls sont capables aujourd'hui, par l'exemplarité de leurs relations et par leur imagination politique, d'entraîner un sursaut européen indispensable pour avancer vers une Union plus politique et plus active dans le monde.

Pèse sur les épaules d'Angela Merkel et de Nicolas Sarkozy une très lourde responsabilité historique qu'ils semblent bien avoir envie de relever...

Editorial paru le site: http://www.jd-giuliani.eu


Jean-Dominique Giuliani est président de la Fondation Robert Schuman

http://robert-schuman.eu

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