par Partick Martin-Genier, le dimanche 19 juillet 2009

Il n'y a hélas pas d'autre terme pour qualifier l'épisode qui s'est déroulé au sein du nouveau parlement européen : les Français se sont faits avoir !


Ils ne détiennent aucune vice-présidence du parlement européen, n'auront qu'une seule présidence stratégique pour Alain Lamassoure : la commissions du budget.

L'autre commission économique et monétaire échoit à une libérale britannique au nom d'une règle complètement obscure aux yeux des électeurs : la règle d'Hondt, qui veut que les présidences de commission soient attribuées par application du système de la proportionnelle intégrale. Oui, mais la mathématique- surtout celle-ci- ne fait pas toujours bon ménage avec le bon sens politique.

Que cette commission échoit à une députée dont le pays n'est pas membre de la zone euro et qui n'a jamais fait montre d'une européisme forcené -c'est le moins que l'on puisse dire- ni même d'un volontarisme dans le domaine économique, constitue une sorte de provocation…D'ici à dire, comme l'a affirmé Pervenche Bérès députée socialiste, que l'on a "remis les clés à un voleur", il y a un pas que nous ne franchirons pas… Néanmoins, le choix en effet n'est pas judicieux.

Ce qui vient de se passer au parlement européen illustre une fois de plus le fossé qui existe entre la conception française de la politique et la conception européenne et collective du travail parlementaire. Les Français font preuve d'une grande naïveté voire d'une certaine forme de dilettantisme, quand les Britanniques et les Allemands sont très présents et pragmatiques, pratiquent en outre un lobbysme qui constitue une réelle force dans les jeux d'influence à Bruxelles.

On vient ainsi nous expliquer que le poste de vice-président du parlement européen ne serait d'aucune importance…Comment dire une chose pareille alors qu'un vice-président put présider des séances du parlement et donc orienter ses travaux, qu'il dispose d'un poste prestigieux qu'il peut faire valoir à l'extérieur de l'Union ? L'éviction de députés français de plusieurs postes importants pourrait avoir des conséquences fâcheuses pour l'avenir : on sait par exemple que de plus en plus de parlementaires militent pour que le parlement européen s'installe définitivement à Bruxelles, même si cette décision revient aux chefs d'Etat et de gouvernement. Ces derniers savant-ils seulement ou feignent-ils d'ignorer que les sessions strasbourgeoises se réduisent souvent à leur plus simple expression ?...

Les socialistes, quant à eux, sortent dépouillés de cette course aux postes : c'est logique puisque ce sont les conservateurs et libéraux qui ont globalement remporté ces élections.

Une autre règle sacro-sainte mériterait aussi d'être revue : au nom de quelle logique la présidence du parlement européen tourne-t-elle invariablement depuis trente ans entre les démocrates chrétiens et les socialistes, à raison d'un demi mandat de deux ans et demi pour chacun de ces groupes sur l'ensemble de la législature ?

On a trop souvent parlé de la distance entre l'Europe et les électeurs : par ce qui vient de se passer à Bruxelles, on ne peut pas dire que la nouvelle législature commence sous les meilleurs auspices….


Patrick Martin-Genier est Maître de conférence à l'Institut d'études politiques de Paris.

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