Avec la Suède représentée par Fredrik Reinfeldt à la présidence de l'Union européenne, les Européens vont-ils retrouver la confiance et s'impliquer un peu plus ? Tout laisse espérer que oui.
La Suède affiche quelques grandes priorités : la lutte contre la récession
économique avec une meilleure régulation et une plus grande transparence sur les marchés, et pour une nouvelle croissance plus écologique (1), une politique extérieure plus offensive.
Ses atouts : un modèle social et environnemental (2) qui fait référence, une industrie à haute valeur ajoutée, une économie ouverte sur le monde...et une européanité qui s'est construite depuis 1994, malgré des débuts difficiles. A tel point qu'aujourd'hui les Suédois se déclarent prêts à entrer dans la zone euro.
Parmi les projets que le "jeune" premier ministre, libéral social, défend, citons ceux que seule l'Union européenne (UE) est en mesure d'assumer, et qui permettront à celle-ci de mieux devenir un acteur global dans le monde. Déjà avec nos voisins :
- la stratégie UE/mer Baltique nécessitera beaucoup de diplomatie avec la Russie, s'appuyant sur des coopérations renforcées entre la Suède et les pays baltes, la Pologne, la Finlande, le Danemark et l'Allemagne : un premier défi!
- l'accélération des processus d'adhésion des pays des Balkans, un véritable enjeu pour la cohésion et la démocratie européennes ;
- la poursuite et le développement des négociations avec la Turquie pour son adhésion à l'UE, une question stratégique pour Ankara : un autre défi!
Mais aussi avec les autres régions du monde :
- la présidence suédoise s'engage pour que Copenhague soit un succès et pour parvenir à un accord sur les objectifs de limiter le réchauffement climatique à 2°c -ce qui ne définit pas encore un agenda- et de financer les mesures de réduction de gaz à effet de serre et la solidarité avec les pays émergents. Ce troisième grand défi sera préparé, d'ici la fin de l'année, par des sommets bilatéraux avec les USA, la Chine, l'Inde, le Brésil, l'Afrique du Sud, la Russie et l'Ukraine.
Un engagement européen qui tranche avec l'euroscepticisme de la présidence tchèque qui, malgré tout, a réussi à faire avancer toute une série de dossiers, à commencer par le Traité de Lisbonne. En effet, la République tchèque est le 26ème Etat à l'avoir adopté et elle a ouvert la voie au référendum en Irlande... Un processus institutionnel positif qui permettra peut-être d'éviter une crise de gouvernance, et donnera à la présidence suédoise les moyens de sa politique, lui permettra de travailler plus sereinement et plus efficacement. Pas sûr que, dans ces conditions, il faille précipiter l'élection de Barroso dont le programme n'est pas à la mesure des défis que la Suède elle-même s'est proposé de relever!
Toute la question est de savoir si les options de la présidence suédoise seront suffisamment dynamiques pour remobiliser des Européens qui n'ont pas montré d'engouement -c'est le moins que l'on puisse dire- pour les institutions européennes.
Il manque encore de la clarté sur la volonté des Etats et des sociétés de bâtir les futures politiques communes pour relever les défis industriels, écologiques et éducatifs, de consolider le Marché intérieur, d'engager la réforme de l'Union économique et monétaire avec l'ouverture d'un débat sur la
fiscalité et le budget, qui sera "la grosse affaire" de la législature. Que notre ami et vice-président de Confrontations Europe, Alain Lamassoure préside la commission "Budget" du Parlement européen, est une excellente nouvelle pour l'UE et les Européens.
Ces questions sont urgentes car la crise économique est encore devant nous -et ce, malgré les petits signes d'un rebond. Les restructurations bancaires et industrielles vont nécessiter une politique sociale européenne et les investissements lourds dans une économie décarbonnée, une finance de long terme : deux autres défis qui ne sont pas encore à l'ordre du jour. Cela dépend des institutions de les inscrire à l'agenda, mais tout autant de nous tous pour qu'ils deviennent des priorités! (3).
(1) L'efficacité énergétique et la transition de l'UE vers une économie éco-efficace feront partie des thèmes phares de la présidence avec la volonté d'aboutir sur les trois propositions législatives relatives à la performance énergétique. Deux sessions informelles auront lieu à Are les 23 et 24 juillet.
(2) Les Suédois comptent parmi les Européens qui émettent le moins de CO2 (6,7 tonnes par habitant et par an, contre 9,3 en moyenne dans l'UE). Ils ont instauré une taxe carbone dès 1991 : depuis les EGES (émissions de gaz à effet de serre) ont été réduits de 9%, alors que la croissance économique était de 48%.
(3) Après la session du 23 juin sur "le paquet Climat : un moteur de sortie
de crise?", Confrontations Europe organise les 10 et 11 décembre à Bruxelles, la 2ème session des Entretiens économiques européens 2009 sur la transformation du capitalisme : Entreprises et Politiques face à la crise. Objectifs formation-emploi et finance de long terme. (Voir les actes du 23
juin et le projet de décembre sur le site www.confrontations.org).
Claude Fischer est présidente de Confrontations Europe
http://www.confrontations.org